Le Système mondial d’observation

01 mars 2013

Par Sue Barrell1, Lars Peter Riishojgaard2 et Jochen Dibbern3 avec la contribution de beaucoup d’autres personnes

Trois joyaux brillent de tous leurs feux sur la couronne de la Veille météorologique mondiale: le Système mondial d’observation (SMO), le Système mondial de télécommunications (SMT) et le Système mondial de traitement des données et de prévision (SMTDP). Comme l’anticipait très justement le plan de mise en oeuvre de la VMM, ces trois composantes accomplissent des prouesses parce qu’elles fonctionnent en parfaite liaison les unes avec les autres et parce qu’elles sont résolument orientées vers les exigences des utilisateurs. Le tout est plus grand que la somme des parties et aucune composante ne pourrait, à elle seule, procurer les résultats attendus. Le SMO occupe peut-être une place particulière en ce qu’il est à la base des autres: il fournit les observations essentielles qui sont diffusées par le SMT puis assimilées et traitées par le SMTDP pour en faire des produits de prévision.

Le SMO est un dispositif extrêmement complexe que l’on peut sans doute considérer comme l’un des projets les plus ambitieux, et l’une des réussites les plus éclatantes, de la collaboration internationale instaurée depuis un siècle. Il se compose d’une multitude de systèmes d’observation possèdent et qu’exploitent autant d’organismes instances de tutelle, priorités globales et modalités de gestion différentes. Pourtant, presque tous respectent les transmission des données. Grâce au fonctionnement combiné du SMO et du SMT, les Membres et les partenaires de l’Organisation reçoivent et échangent chaque jour des milliards d’observations en temps réel. Sans un tel dispositif, aucun Membre de l’OMM ne serait en mesure de répondre aussi bien qu’il le fait aujourd’hui aux besoins de ses citoyens en matière d’information météorologique.

En dépit de la technicité de notre société – et contrairement, peut-être, à la croyance populaire – notre dépendance à l’égard des conditions météorologiques est plus forte qu’il y a cinquante ans. Cela s’explique par un ensemble de facteurs, dont la croissance exponentielle des transports maritimes et aériens, la proportion grandissante de personnes établies sur le littoral, dans les plaines d’inondation ou d’autres zones vulnérables et le recours à l’agriculture intensive pour faire face à la poussée démographique. La hausse de la demande d’information météorologique, alliée à l’évolution des capacités d’observation, a contraint le SMO à évoluer sans cesse, comme il devra continuer de le faire à l’avenir.


Les composantes du SMO

Lors de sa création, le SMO comprenait des satellites à orbite polaire et quelque 8 000 stations terrestres et 4 000 navires marchands qui transmettaient régulièrement leurs données à la VMM. Environ 800 stations terrestres effectuaient aussi des sondages jusqu’à 30 kilomètres d’altitude. À cela s’ajoutaient les observations manuelles réalisées à partir de 3 000 aéronefs commerciaux.

GOS

Aujourd’hui, la composante de surface du SMO compte environ 11 500 stations terrestres qui effectuent des mesures au moins toutes les trois heures, mais souvent chaque heure, 1 000 radars météorologiques, 1 300 stations d’observation en altitude complétées par une quinzaine de navires marchands qui établissent des profils aérologiques au-dessus de l’océan, plus de 3 000 systèmes automatiques à bord d’aéronefs, 4 000 navires d’observation régulière, 1 250 bouées dérivantes, au-delà de 500 bouées ancrées et une multitude d’autres types de stations (profileurs du vent,systèmes de détection d’éclairs, marégraphes, etc.) – qui tous envoient leurs données à la VMM. À peu près 4 000 stations terrestres composent les réseaux synoptiques de base régionaux et plus de 3 000 les réseaux climatologiques de base régionaux qui ont été mis en place par les six conseils régionaux de l’OMM. Une partie des stations terrestres forme le Réseau de stations d’observation en surface pour le Système mondial d’observation du climat (SMOC), tandis qu’une partie des stations aérologiques forme le Réseau de stations d’observation en altitude pour le SMOC.

Si l’émergence de l’ère spatiale a largement contribué à la création de la VMM, c’est la combinaison des composantes au sol et dans l’espace du SMO qui a été la clé de la réussite, de la participation et l’engagement de tous les Membres et de la transformation des données et informations en produits nécessaires et utiles.


Le rôle de l’OMM au sein du SMO

Les composantes du SMO appartiennent aux Services météorologiques et hydrologiques nationaux des Membres, à d’autres organismes nationaux et internationaux ou à des sociétés privées. L’Organisation se charge de coordonner et de guider les activités du SMO au jour le jour, mais aussi dans son évolution stratégique. Elle procède à une étude continue des besoins afin de connaître en permanence les attentes des utilisateurs et de les rapprocher des capacités d’observation existantes et futures. C’est la Commission des systèmes de base qui accomplit cette tâche. L’essentiel du travail est confié au Groupe d’action sectoriel ouvert (GASO) des systèmes d’observation intégrés, qui se compose d’équipes d’experts et de points de contact formels et informels avec d’autres entités à l’intérieur et à l’extérieur de l’OMM, par exemple les commissions techniques et les conseils régionaux.

L’étude continue des besoins4 repose sur deux piliers:

• Une base de données régulièrement actualisée sur les observations qui sont requises dans tous les domaines d’application que soutiennent les programmes de l’OMM;

• Une base de données à jour sur l’ensemble des capacités d’observation dont peuvent bénéficier les Membres et les partenaires de l’Organisation par le biais du Système mondial intégré des systèmes d’observation de l’OMM (WIGOS).

La comparaison, une fois par an, du contenu des deux bases de données permet de cerner les lacunes et de formuler des déclarations d’orientation pour chaque domaine d’application. Ces déclarations, de nature tactique, intéressent autant les experts des applications que les concepteurs et fournisseurs de systèmes d’observation. Elles présentent succinctement aux premiers les capacités qui existent, et permettent aux seconds d’obtenir facilement et à tout moment une liste des principales lacunes que présente le SMO.

L’information tactique donnée dans les déclarations d’orientation est complétée par deux documents cruciaux, de nature plus stratégique, à savoir la Perspective d’avenir du Système mondial d’observation5 et le Plan d’action pour l’évolution des systèmes mondiaux d’observation6. Le premier expose à grands traits les capacités d’observation dont devraient bénéficier les utilisateurs d’ici à une quinzaine d’années (la version actuelle va jusqu’en 2025), le deuxième énumère les mesures qui devront être prises pour concrétiser ces attentes. Les deux documents ont été approuvés par la Commission des systèmes de base puis adoptés par le Conseil exécutif en tant que positions officielles de l’Organisation.

Le Programme spatial de l’OMM

Il coordonne tout ce qui a trait aux satellites environnementaux dans les différents programmes de l’Organisation afin de faciliter et de promouvoir une bonne utilisation des données et des produits satellitaires dans le monde. Il s’attache avant tout à garantir la continuité des observations qui sont indispensables pour la prévision numérique du temps et la prévision immédiate, à mettre durablement en place un système d’observation au service de la surveillance du climat et à étendre le recours aux satellites dans les régions de l’OMM et dans divers domaines d’application.

Le Programme spatial encourage le dialogue et la coopération entre les exploitants de satellites afin que les activités en cours et les plans à long terme intègrent autant que possible les besoins des utilisateurs en matière de données (processus réalisé grâce à l’étude continue des besoins gérée par le SMO). La coopération internationale a permis au Groupe de coordination pour les satellites météorologiques (CGMS) d’élaborer des plans en vertu desquels les satellites d’un exploitant servent d’appareils de secours aux autres, parce qu’il est impératif de veiller à la continuité des opérations au sein des missions essentielles.

Le Système mondial d’interétalonnage des instruments satellitaires, actuellement à l’étape préopérationnelle, procédera de façon régulière à un étalonnage précis et uniforme des mesures radiométriques provenant de tous les satellites, condition nécessaire pour garantir l’interopérabilité, la cohérence et la traçabilité des observations spatiales, au profit notamment de la modélisation du climat et de la détection des tendances climatiques.

Le Programme spatial favorise également la coordination mondiale des plans à long terme, de manière à optimiser les avantages des diverses missions satellitaires prévues dans les prochaines décennies et à permettre l’observation adéquate des phénomènes atmosphériques et autres paramètres de l’environnement. Cela pourrait amener à réexaminer la position vraie des satellites géostationnaires opérationnels au-dessus de l’Équateur et la distribution des missions en orbite basse quant à l’heure de franchissement de l’Équateur et aux orbites non héliosynchrones.

Le système d’observation à partir de l’espace, qui devait au départ servir la météorologie opérationnelle, a considérablement évolué; il est aujourd’hui la plus grande composante spatiale du Système mondial intégré des systèmes d’observation de l’OMM (WIGOS). Ce dernier répond aux besoins de l’Organisation en matière de données sur l’atmosphère, l’océan et les terres émergées, en accordant une large place à la surveillance du climat et à la réduction des risques de catastrophes. Le Programme prend activement part aux activités conduites par la Veille météorologique mondiale, la Veille de l’atmosphère globale, les programmes coparrainés tel le Système mondial d’observation du climat, les organismes internationaux, dont le CGMS et ses groupes de travail scientifiques, et le Comité sur les satellites d’observation de la Terre.
L’une des tâches prioritaires du Programme est d’élaborer l’architecture de surveillance du climat depuis l’espace qui garantira la mesure à long terme des indicateurs et des facteurs d’évolution du climat et fera en sorte que ces observations soient intégrées dans des processus validés de bout en bout pour fournir l’information et les services climatologiques au titre du CMSC.
La composante spatiale du Système mondial d’observation
La composante spatiale du Système mondial d’observation

 
La prévision numérique du temps

Les spécialistes de la prévision numérique du temps (PNT) dans le monde sont des partenaires indispensables de l’OMM pour continuer à développer le SMO, partenariat dont les avantages sont clairement perçus de part et d’autre. L’efficacité de la PNT s’est améliorée au fil des décennies, grâce à de multiples facteurs dont l’augmentation rapide de la puissance de calcul et une compréhension et caractérisation plus fines des processus atmosphériques. Depuis quelques années, les données provenant des satellites aident grandement à accroître la performance des systèmes de PNT, surtout à l’échelle du globe, ce qui allonge les délais des prévisions et des alertes. Les progrès sont encore plus nets dans l’hémisphère Sud, où les données satellitaires comblent de graves lacunes sur le plan des observations classiques en surface.

La PNT est à la base de la plupart des activités de prévision météorologique et climatologique. Elle mesure avec certitude l’information présente dans les observations qui alimentent ses modèles. C’est pourquoi les déclarations d’orientation, tout comme les documents de nature plus stratégique, s’inspirent largement des diagnostics de la PNT concernant l’apport des différents systèmes d’information aux capacités de prévision.

L’OMM parraine depuis 1997 l’Atelier sur les incidences de divers systèmes d’observation sur la prévision numérique du temps, qui est devenu au fil des ans le principal cadre international où l’on présente et compare les études d’impact. Ils réunissent les représentants des grands centres de PNT, les experts scientifiques et les fournisseurs de données. C’est l’un des moyens par lesquels le Groupe d’action sectoriel ouvert des systèmes d’observation intégrés obtient l’avis des utilisateurs sur les mesures objectives des incidences des observations.

Les méthodes d’évaluation objective permettent de mieux cerner l’apport des différents systèmes à la PNT et, ce faisant, aident à prendre des décisions importantes sur les investissements à réaliser dans les réseaux d’observation.

 


L’évolution des composantes du SMO et les perspectives d’avenir

Observations d’aéronefs et programme AMDAR

Voilà longtemps que des liens étroits ont été tissés entre la météorologie et l’aéronautique, au profit des deux secteurs. Il est aisé de comprendre que la gestion du trafic aérien et les opérations des compagnies aériennes ont absolument besoin des informations et prévisions météorologiques pour assurer la sécurité des passagers et la rentabilité des vols, mais on sait moins que le secteur aéronautique fournit des données précieuses pour les applications liées au temps et au climat.

Au départ, ces données se limitaient essentiellement aux relevés d’instruments météorologiques simples et aux informations transmises verbalement par les pilotes sur les phénomènes et les conditions rencontrés en vol. L’avènement des radiocommunications et le perfectionnement de l’avionique et des équipements embarqués ont conduit à normaliser ces comptes rendus puis à les automatiser, sous la forme des messages météorologiques d’aéronefs (AIREP).

Pendant des décennies, les scientifiques s’en sont remis aux opérations aériennes pour connaître les conditions en altitude. Au début des années 1970, l’aéronautique et la météorologie ont uni leurs forces et lancé conjointement des programmes opérationnels, entièrement automatiques, de mesure des paramètres de l’atmosphère par les aéronefs commerciaux.

Le premier programme reposait sur un système d’acquisition et de retransmission par satellite des données d’aéronefs (ASDAR) qui exigeait d’équiper les fuselages d’appareils spéciaux. Le système de retransmission des données météorologiques d’aéronefs (AMDAR) est apparu dans les années 1980. Il fournit les observations provenant des capteurs et des systèmes d’avionique et de communication qui font partie de l’aéronef – sans qu’il soit nécessaire de modifier la cellule ou les systèmes en place. Cet énorme avantage n’est pas étranger à l’essor rapide qu’a connu le programme AMDAR depuis deux décennies; c’est aujourd’hui l’une des grandes composantes du SMO. Une quarantaine de compagnies aériennes et plus de 3 000 aéronefs fournissent chaque jour au-delà de 300 000 observations de qualité sur la température, les vents, l’humidité et d’autres variables importantes. Aux observations AMDAR s’ajoutent les observations météorologiques effectuées automatiquement à partir de la plate-forme d’aéronef, en tant que retombées secondaires des systèmes institués par l’Organisation de l’aviation civile internationale, telle la surveillance dépendante automatique.

Régions du globe couvertes par les observations d’aéronefs au cours d’une période de 24 heures, en décembre 2012
Régions du globe couvertes par les observations d’aéronefs au cours d’une période
de 24 heures, en décembre 2012


On s’attend à une croissance exponentielle des précieuses données fournies par les aéronefs, ce qui améliorera la couverture du globe. La multiplication des mesures de l’humidité pourrait aider les opérations aériennes et contribuer à la protection de l’environnement, grâce à des applications destinées à éviter la formation de traînées de condensation, à signaler les risques de givrage et à réduire la consommation de carburant, par exemple.

La mesure d’autres éléments atmosphériques qui présentent un intérêt pour le secteur aéronautique et pour l’environnement (cendres volcaniques, dioxyde de carbone, méthane, etc.) commence à peine mais elle devrait s’étendre.


Radars météorologiques (précipitations)

Même si les réseaux de radars météorologiques s’étoffent – un millier d’appareils sont exploités par les Services météorologiques et hydrologiques nationaux – une bonne partie des terres émergées n’est toujours pas couverte. Sur le plan de la technologie, les logiciels de traitement du signal et les capacités ont considérablement progressé. Le passage à la polarimétrie est en cours dans toutes les installations neuves. Après des décennies d’intenses recherches, la polarimétrie est prête à être utilisée en exploitation; elle devrait améliorer la classification des échos, la suppression des éléments non météorologiques et la correction pour l’atténuation due aux hydrométéores dans les bandes C et X, ce qui affinera l’estimation de l’intensité des pluies.

Les progrès de la prévision immédiate

Les observations sont particulièrement importantes pour établir des avis et prévisions à très brève échéance. À ces échelles, les premières sources d’information des prévisionnistes ne sont plus les résultats des modèles, mais les observations elles-mêmes. Des techniques ont été mises au point pour intégrer, interpréter et projeter dans le temps les informations provenant des radars météorologiques, d’autres systèmes d’observation au sol et de l’imagerie satellitaire à haute résolution afin de pouvoir fournir des prévisions à très courte échéance, également appelées prévisions immédiates. Ces produits ne sont pleinement utiles que si les personnes concernées les reçoivent et y réagissent sans tarder. Une réaction, même partielle, permet d’éviter de graves conséquences dans les centres urbains très denses, quand des secteurs clés sont menacés (exploitation minière, transports, etc.) ou lorsque la sécurité des personnes est en jeu. Trop de pays en développement n’ont pas encore la capacité de prendre toutes les mesures voulues, mais une autre étape devrait être franchie grâce au projet de démonstration concernant la prévision des conditions météorologiques extrêmes, aux activités similaires et à la large diffusion prochaine des données de satellites géostationnaires présentant une grande fréquence spatio-temporelle.
 
Fortes tempêtes au-dessus et à proximité de Brisbane, dans l’Etat du Queensland en Australie, détectées par trois radars météorologiques du réseau national le 18 novembre 2012. Les systèmes en cause se sont formés rapidement, ont déversé à plusieurs endroits des grêlons plus gros qu’une balle de golfe et ont déclenché des crues éclair. (Données traitées avec le système BALTRAD par l’Institut suédois de météorologie et d’hydrologie et le Service météorologique australien)
Fortes tempêtes au-dessus et à proximité de Brisbane, dans l’Etat du Queensland en Australie, détectées par trois radars météorologiques du réseau national le 18 novembre 2012. Les systèmes en cause se sont formés rapidement, ont déversé à plusieurs endroits des grêlons plus gros qu’une balle de golfe et ont déclenché des crues éclair. (Données traitées avec le système BALTRAD par l’Institut suédois de météorologie et d’hydrologie et le Service météorologique australien)

 


L’expansion des réseaux s’explique notamment par la tendance à utiliser des radars en bande X dans les systèmes opérationnels afin d’étendre la couverture, par exemple dans les régions accidentées ou en milieu urbain, surtout pour les applications hydrologiques touchant les crues éclair. L’un des avantages de la bande X est d’abaisser le coût des systèmes et de l’infrastructure.

Les modèles de prévision numérique du temps (PNT) utilisent de plus en plus les données radar. Les valeurs d’intensité des précipitations, les réflectivités radar, les données sur le vent radial et les profils verticaux du vent obtenus au moyen de radars servent à la fois à l’assimilation et à la vérification; il a été démontré qu’ils améliorent la capacité de prévision des modèles. L’échange de telles données à l’échelle internationale est indispensable pour continuer à avancer dans cette voie.


Profileurs du vent

La démonstration de l’efficacité de ces appareils pour mesurer le profil vertical du vecteur vent horizontal à partir du sol a été faite au début des années 1970. La technique n’a cessé de s’étendre et de s’améliorer depuis. Son grand avantage est de fournir des profils verticaux du vent horizontal à haute résolution temporelle quelles que soient les conditions météorologiques, que le ciel soit couvert ou dégagé, sans nécessiter d’information supplémentaire. Aucun autre instrument de télédétection ne présente des capacités similaires. Il a été établi que l’exactitude des données émanant de profileurs du vent en bon état de fonctionnement, utilisés comme il convient, était comparable, sinon supérieure, à celle des mesures du vent par radiosonde. De nos jours, ces appareils sont couramment employés en météorologie opérationnelle comme en recherche.

Profileur du vent doté de cinq panneaux à Payerne, Suisse
Profileur du vent doté de cinq panneaux à Payerne, Suisse ©MeteoSuisse


L’Administration américaine pour les océans et l’atmosphère (NOAA) a créé au milieu des années 1990 le premier réseau opérationnel de profileurs au moyen de radars à ondes décimétriques (404 et 449 MHz). D’autres réseaux sont ensuite apparus en Europe et en Asie. Vu le nombre d’installations, de plus en plus de données produites par les radars profileurs du vent sont assimilées pour la PNT depuis dix ans. Une étude conduite par le Service météorologique du Royaume-Uni a montré qu’elles réduisaient nettement les erreurs de prévision, dans les modèles mondiaux aussi bien que dans les modèles à haute résolution, et que l’impact global excédait celui des données de radiosondage.

Les observations à haute résolution émanant des radars profileurs du vent conviennent particulièrement bien à la description de l’état de l’atmosphère aux échelles moyennes ou inférieures, ce qui est rarement le cas des autres données. Il est probable que l’avantage sera encore plus marqué avec les modèles d’échelle moyenne.


Données du Système mondial de navigation par satellite (GNSS) au sol

Les mesures de l’humidité par le système d’observation météorologique ne sont toujours pas suffisantes, problème auquel on remédie depuis quelques années en utilisant des données du GNSS au sol (délai zénithal total, ou ZTD). La plupart des sites du GNSS étant choisis à des fins de positionnement, le délai atmosphérique est un terme de bruit pour les exploitants et les principaux utilisateurs. Il est cependant possible, à partir des mesures de ZTD, d’estimer la colonne de vapeur d’eau atmosphérique au-dessus des sites en question, valeurs qui peuvent ensuite être transmises en temps quasi réel en vue d’applications météorologiques opérationnelles.

La production d’estimations de ZTD en temps quasi réel exige une étroite collaboration entre les domaines de la géodésie et de la météorologie, qui devraient tous deux en bénéficier puisque l’information météorologique aidera à affiner encore le positionnement par le GNSS. Le GPS américain et le GLONASS russe sont les deux systèmes les plus connus, mais l’Europe et l’Asie sont en train de se doter de leurs propres installations. La qualité des estimations de ZTD en sera plus grande et de nouveaux produits atmosphériques du GNSS, plus détaillés, pourront être établis à des fins météorologiques (gradients, délais obliques, reconstruction tomographique des champs de vapeur d’eau).

Le réseau de ZTD en temps quasi réel du GNSS a pris énormément d’ampleur depuis le début du millénaire. On estime que les données de 4 000 à 5 000 sites sont aujourd’hui disponibles, la majorité provenant de réseaux denses en Europe de l’Ouest, en Amérique du Nord et au Japon. Une forte hausse est attendue dans les prochaines années. Les données de ZTD européennes sont diffusées par le biais du SMT en tant qu’observations additionnelles, mais il faut encore intensifier grandement les échanges à l’échelle du globe.

Les observations de ZTD présentent la caractéristique unique de s’améliorer constamment, du temps réel au temps quasi réel, au post-traitement et, enfin, à la réanalyse, car on dispose de plus d’informations de grande qualité sur l’état du GNSS lui-même, à partir des mesures et non des prévisions. Il devient donc possible de générer de meilleurs produits, présentant des délais supérieurs, spécialement conçus pour les applications climatologiques.


Observations maritimes

La météorologie maritime et, plus largement, les applications météorologiques et climatologiques sont fortement tributaires des observations du temps et de l’océan in situ et par satellite. De plus, les mesures in situ en mer procurent la réalité de terrain nécessaire pour valider les observations par satellite et fournissent des données qu’il est impossible d’obtenir par d’autres moyens.

Les navires ont été la seule source d’information de ce genre pendant des décennies, mais de nouvelles plates-formes sont apparues avec la VMM, par exemple les stations météorologiques spécialisées, les bouées dérivantes, les bouées houlographes, les bouées météorologiques et océanographiques ancrées, les marégraphes, les plates-formes de surveillance des tsunamis (qui détectent les tremblements de terre sous l’eau et les ondes sismiques en surface) et, plus récemment, les flotteurs profilants Argo à grande profondeur, les planeurs en surface et sous la surface des océans et les radars côtiers à haute fréquence pour la surveillance des vagues et des courants en surface.

Données climatologiques et météorologiques de divers types provenant de l’ICOADS depuis 1937
Données climatologiques et météorologiques de divers types provenant de l’ICOADS depuis 1937. - icoads.noaa.gov


La création de la VMM a entraîné une hausse spectaculaire des observations; elles sont passées de 1,5 million environ à plus de 9 millions en 75 ans, comme le montre l’évolution du volume de données météorologiques et climatologiques provenant de divers types de plates-formes océaniques (voir le graphique). La baisse marquée du nombre de données provenant des navires a été compensée par l’augmentation des observations fournies par les bouées dérivantes et ancrées.

D’intenses efforts sont déployés depuis dix ans, au sein de l’OMM mais aussi en partenariat avec la Commission océanographique intergouvernementale de l’UNESCO, pour mieux coordonner à l’échelle internationale la conception et la réalisation de systèmes d’observation océanographique et météorologique en milieu marin. Le système mondial initial d’observation de l’océan est achevé à 62 % et trois composantes ont atteint leur premier objectif de mise en oeuvre, à savoir: le réseau mondial de bouées dérivantes (septembre 2005, 1 250 unités), le programme Argo de flotteurs profilants (novembre 2007, 3 000 unités) et la flotte de navires d’observation bénévoles du projet climatique (juin 2007, 250 unités).

De nouvelles technologies devront être mises au point et d’autres variables devront être mesurées, en particulier les paramètres biogéochimiques, pour répondre aux besoins naissants. Il est probable qu’on recourra davantage aux types récents de plates-formes, tels les planeurs en surface et sous-marins, les appareils montés sur des animaux marins et les plates-formes de fond reliées à d’anciens câbles de télécommunication immergés.


Avantages pour les utilisateurs finals

Les retombées de la VMM sont extrêmement variées, que l’on pense à l’augmentation de la productivité agricole, à la réduction de la pollution en milieu urbain ou à la protection de la santé humaine par une gestion plus avisée de l’environnement. Tout aussi importants sont les bases scientifiques sur lesquelles reposent les produits élaborés et les mécanismes grâce auxquels les Services météorologiques et hydrologiques nationaux sont en mesure d’offrir aux utilisateurs finals de meilleurs services axés sur leurs besoins. L’ensemble des composantes de la VMM y participent, mais certains succès notables reviennent plus précisément au SMO.

Toutes les étapes du cycle de la réduction des risques de catastrophes – planification, préparation, prévision, intervention, reconstruction, évaluation – bénéficient du SMO. Les notions d’intégration et de réseaux sous-tendent l’approche multidanger; sans l’intégration mondiale permise par le SMO, les observations locales ne seraient, au mieux, utiles qu’aux autorités locales. La possibilité de mobiliser des moyens régionaux et internationaux quand survient une catastrophe découle de la fiabilité et de la confiance accordées aux observations que le SMO fournit 24 heures sur 24, 365 jours par an, et que le SMT transmet sans délai.

Ce sont les relevés à long terme qui montrent le plus clairement que le climat de la planète change. On pensait que les systèmes à satellites ne permettraient pas de suivre des phénomènes qui s’étendent au-delà de la durée de vie d’un seul appareil, mais on reconnaît maintenant que la composante de surface et la composante spatiale du SMO sont capables de mesurer et d’étayer la tendance temporelle et la distribution spatiale du changement climatique. L’intérêt politique que suscitent aujourd’hui, à un haut niveau et dans le monde entier, la compréhension et l’atténuation des impacts de l’évolution du climat montre concrètement l’utilité de la coopération internationale dans le domaine des observations. Un tel degré d’attention, qui se manifeste aussi dans divers mécanismes internationaux comme les travaux du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat et l’application de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, n’aurait abouti à rien si l’on n’avait pas négocié et adopté des normes internationales d’observation et de transmission et si l’on n’avait pas établi et exploité des systèmes mondiaux de mesure, y compris de solides réseaux de référence. Le SMO montre à quel point il est nécessaire de continuer à étendre et à renforcer les systèmes coordonnés à l’échelle mondiale si l’on veut connaître la nature et l’impact du changement climatique.

Le SMO ne se limite pas aux conditions météorologiques, comme l’attestent ses retombées dans des applications très éloignées de la prévision du temps: il constitue aussi un modèle et une base sur laquelle bâtir des programmes d’observation encore plus complets.

Le SMO concourt directement et indirectement à la croissance et à la prospérité économiques parce que de multiples secteurs ont besoin d’informations et de prévisions météorologiques récentes et fiables pour prendre des décisions à des échelles très différentes. Il joue un rôle de premier plan dans la protection des personnes et des biens.


Poursuivre l’intégration

La notion d’intégration est au coeur du SMO depuis le tout début; il s’agissait de conjuguer et d’optimiser l’apport de différents pour former un ensemble composite de systèmes. Depuis vingt ans, la PNT a révolutionné l’assimilation des observations sur une large gamme d’échelles spatiales et temporelles et a accru sa contribution par l’intégration au niveau des systèmes et des données. On a pu mieux le plus d’information utile. Il est aujourd’hui possible de satisfaire de manière efficace et intégrée les exigences systèmes composites et complémentaires qui tirent au maximum parti du principe de «l’observation unique pour des utilisations multiples», tandis que l’étude continue des besoins aide à savoir quelles mesures particulières doivent être effectuées pour répondre aux attentes des utilisateurs.

Le SMO fait maintenant partie du Système mondial intégré des systèmes d’observation de l’OMM (WIGOS), une architecture encore plus vaste qui permettra à de nouveaux Membres et de nouvelles communautés de bénéficier d’une approche systématique et globale des observations météorologiques. Le WIGOS doit coordonner le fonctionnement de l’ensemble des systèmes d’observation soutenus par l’Organisation et ses Membres; il prolonge en cela le regroupement déjà réalisé au sein du SMO en intégrant d’autres systèmes, dont la Veille de l’atmosphère globale, le Système mondial d’observation du cycle hydrologique, le Réseau de référence pour la mesure du rayonnement en surface et le Système mondial d’observation du climat. Le but est de constituer un ensemble complet, coordonné et viable de systèmes d’observation et, avec l’aide du Système d’information de l’OMM, de faire en sorte que les Membres puissent fournir un large éventail de services fondés sur les observations et répondre plus justement aux besoins des programmes de recherche. Le WIGOS contribue aussi de manière sensible au Système mondial des systèmes d’observation de la Terre en lui apportant toute la capacité et l’expérience de la VMM, l’approche intégrée et systématique du SMO axée sur les besoins, les liens tissés avec les utilisateurs et l’esprit de coopération et de collaboration volontaires à l’échelle internationale.

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1 Vice-Présidente de la CSB et Directrice adjointe, Observations and Engineering, Bureau of Meteorology, Australie

2 Président du GASO des systèmes d’observation intégrés relevant de la CSB et Directeur, Joint Centre for Satellite Data Assimilation, NOAA Science Centre

3 Coprésident du GASO des systèmes d’observation intégrés relevant de la CSB et Directeur, Technical Infrastructure and Operations, Deutscher Wetterdienst, Allemagne


4 www.wmo.int/pages/prog/www/OSY/Documentation/RRR-process.pdf

5ftp://ftp.wmo.int/Documents/PublicWeb/mainweb/meetings/cbodies/governance/tc_reports/french/pdf/1040_fr.pdf
6 http://www.wmo.int/pages/prog/www/OSY/Publications/EGOS-IP-2025/EGOS-IP-2025-fr.pdf

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