par Colin Summerhayes1, Bob Dickson2, Mike Meredith3, Peter Dexter4 et Keith Alverson5
Introduction
Ce qui importe dans l’organisation de l’Année polaire internationale (API) 2007-2009, ce sont ses retombées (Allison et al., 2007). Ainsi, l’Année géophysique internationale (AGI) de 1957/58 avait-elle contribué tout particulièrement à la création dans l’Antarctique d’un réseau de bases qui allaient servir de tremplins à un programme ambitieux d’exploration de l’intérieur du continent. Ces bases, pour la plupart, sont encore en activité de nos jours et certaines nations, qui n’avaient pourtant pas participé à l’AGI, en ont installé récemment de nouvelles, compte tenu de l’intérêt scientifique toujours croissant que les régions polaires suscitent.
Dans le cas de l’API 2007-2009, l’attention sera axée sur des retombées scientifiques d’une nature différente, à savoir la mise en place de systèmes d’observation qui nous permettront de déceler et de suivre de près les changements que subit le système glaces de mer/océan/atmosphère aux latitudes élevées et d’obtenir des données indispensables à la prévision des changements futurs. Cette différence de démarche entre l’AGI et l’API découle des progrès énormes accomplis ces 50 dernières années en matière de robotisation, d’automatisation, de miniaturisation, de communication et de puissance de calcul. Ces progrès nous permettent d’aborder pour la première fois l’étude de régions, notamment les océans polaires, pour lesquelles on ne possédait jusqu’alors aucune donnée ou que des données très parcellaires. Au cours des préparatifs de l’API, l’OMM, en partenariat avec le Conseil international des unions scientifiques (CIUS) et avec la Commission océanographique intergouvernementale (COI) de l’UNESCO, a mis en avant la notion selon laquelle les investissements engagés dans l’API 2007-2009 devaient conduire principalement à l’élaboration de systèmes d’observation des océans Arctique et Austral. Certaines parties de ces océans sont d’un accès difficile, car prises par les glaces durant six mois de l’année. Il est en outre habituellement pénible d’y travailler, compte tenu des conditions prédominantes: vent violent, mer forte, mauvaise visibilité, température inférieure à zéro, obscurité 24 heures sur 24 en hiver et givrage des superstructures des navires.
L’automatisation associée aux systèmes de télémesure et de communication modernes, notamment dans le cas des flotteurs profonds, des mouillages équipés d’instruments, des hydroplaneurs et des véhicules sous-marins autonomes, ainsi que des engins automatiques installés sur d’autres plates-formes autonomes ou encore des systèmes modernes de communication acoustique sous-marine, nous permet néanmoins de disposer maintenant de moyens au vaste potentiel pour recueillir les données in situ qui faisaient défaut auparavant, afin de les combiner avec les données de satellites à présent éprouvées. En exploitant ce potentiel, nous devrions parvenir à réaliser ce qui était difficile auparavant, à savoir exécuter des mesures océanographiques toute l’année, y compris sous la glace.
Dans l’Arctique, il est question d’élaborer et d’exploiter un Système intégré d’observation de l’océan Arctique (iAOOS), tandis que, dans l’Antarctique, il s’agirait d’un Système d’observation de l’océan Austral (SOOS). La mise en œuvre de ces deux systèmes d’observation sera synonyme de connaissance, de compréhension et de prévision: la connaissance à tout moment de l’état des océans, la compréhension des processus en jeu et la capacité de tirer parti à la fois de cette connaissance et de cette compréhension dans des modèles numériques perfectionnés pour prévoir toute évolution. Les deux nouveaux systèmes contribueront directement au Système mondial d’observation de l’océan (GOOS), que parrainent la COI, l’OMM et le PNUE, et indirectement au Système mondial d’observation du climat (SMOC), dont le GOOS constitue la composante océanique. Le GOOS et le SMOC sont à leur tour des éléments du Système mondial des systèmes d’observation de la Terre (GEOSS) auprès duquel les dirigeants politiques de la planète prennent conseil. Ni l’iAOOS, ni le SOOS ne constituent des organes régionaux du GOOS, il s’agit en fait de programmes techniques que diverses nations mettront en œuvre soit en collaboration soit séparément, suivant le cas.
L’observation des océans Arctique et Austral fera appel à toute une gamme d’instruments, directement tirés ou s’inspirant des méthodes d’observation mises au point dans le domaine de l’océanographie et mises en œuvre et exploitées en coordination sous l’égide de la Commission technique mixte OMM/COI d’océanographie et de météorologie maritime (CMOM), ce qui comprend par exemple les mesures exécutées par les navires, par les bouées dérivantes ou ancrées et par les stations situées au niveau de la mer.
Les systèmes d’observation des océans polaires à mettre en place viendront compléter le Système d’observation de la cryosphère (CryOS) créé récemment par les partenaires du Système mondial intégré de stations océaniques (SMISO). Le CryOS a été mis au point par le Programme mondial de recherche sur le climat (PMRC) et par le Comité scientifique pour la recherche antarctique (SCAR); il formule notamment des recommandations en matière d’observation des glaces en mer (pour obtenir davantage de détails, voir http://www.igospartners.org/cryosphere.htm).
Cela fait bien plus d’un siècle que l’on admet qu’il est nécessaire de disposer de systèmes d’observation intégrés et durables, en particulier dans les régions polaires où les effets du réchauffement planétaire se manifestent plus rapidement qu’ailleurs. C’est l’architecte de la première Année polaire internationale, le visionnaire autrichien Karl Weyprecht qui le premier a déclaré publiquement qu’il fallait étudier la Terre en tant que système intégré et que, pour cela, il fallait exécuter des observations coordonnées et synchronisées qui fourniraient des informations sur les caractéristiques, l’évolution et la nature distincte des phénomènes dans l’espace et le temps (Weyprecht, 1879).
Les pouvoirs publics attendent avec impatience que les scientifiques prennent des initiatives dans ce sens. Les participants à la réunion ministérielle du Conseil de l’Arctique qui s’est déroulée le 26 octobre 2006 ont exhorté tous les pays membres à poursuivre et à renforcer le suivi à long terme des changements dans toutes les régions de l’Arctique et ont demandé que l’on s’efforce de mettre sur pied un réseau coordonné d’observation dans l’Arctique qui permettrait de répondre aux besoins de la société; ainsi ont-ils établi clairement un mandat en faveur de réseaux durables d’observation dans l’Arctique. Lors de la réunion consultative du Traité sur l’Antarctique, qui a eu lieu le 11 mai 2006, il a été décidé d’exhorter les Parties à poursuivre et à renforcer le suivi scientifique à long terme et l’observation durable de l’évolution de l’environnement en Antarctique, dans ses composantes physiques, chimiques, géologiques et biologiques; à contribuer à l’exploitation d’un système d’observation coordonné de l’Antarctique au cours de l’API (2007-2009); et à apporter leur concours au suivi à long terme et à l’observation durable de l’environnement en Antarctique ainsi qu’à la gestion des données recueillies, en tant que retombées principales de l’API, pour qu’il soit possible de détecter les incidences des changements environnementaux et climatiques, d’en étayer la compréhension et d’en rendre possible la prévision.
Un Système d’observation de l’océan Austral (SOOS)
Concordance des changements antarctiques et subantarctiques
Pour que la société puisse s’adapter à l’évolution du climat ou en atténuer les effets, il faut avant tout qu’elle s’applique à bien comprendre comment le système climatique fonctionne. L’océan emmagasine d’immenses quantités de chaleur et de dioxyde de carbone, le plus connu des gaz à effet de serre, qu’il déplace lentement autour du globe, influençant ainsi le climat tant à l’échelle régionale que planétaire. Véritable rond-point des eaux océaniques mondiales, l’océan Austral tient un rôle clef dans la circulation océanique générale: il reçoit les signaux climatiques des autres océans de la planète auxquels il transmet l’emprunte du climat de la région antarctique. L’eau profonde de l’Atlantique Nord (NADW) y apporte les signaux provenant des mers de Norvège, du Groenland et du Labrador. Cette eau vient alimenter le courant circumpolaire antarctique (ACC), le plus grand courant océanique dans le monde, dont le volume de transport atteint 130 millions de mètres cubes par seconde; elle y rejoint d’autres eaux profondes pour former l’eau profonde circumpolaire (CDW). Sous l’influence du régime quasi permanent des vents forts d’ouest, les eaux de surface sont poussées vers le nord, ce qui engendre une remontée de l’eau profonde circumpolaire aux abords du continent. Au niveau du plateau continental, cette eau est suffisamment refroidie pour gagner en densité et s’enfoncer le long du talus continental pour former l’eau de fond antarctique (AABW) qui oxygène et refroidit les couches abyssales des océans de la planète. Plus au nord, dans le courant circumpolaire antarctique, les processus qui participent au fait que les eaux de surface s’enfoncent conduisent à la formation de l’eau modale subantarctique et de l’eau intermédiaire antarctique plus dense. Ces masses d’eau se situent au-dessous de la surface et de la thermocline, jusqu’à une profondeur de plusieurs centaines de mètres voire plus; on sait qu’elles sont sensibles aux variations du forçage climatique, y compris celles causées par les effets d’origine anthropique.
La compréhension de ces processus océanographiques et de leurs relations avec le reste du système climatique représente l’un des fondements indispensables à la prévision des caractéristiques des changements à venir: chronologie, ordre de grandeur et sens; elle exige donc une étude approfondie et suivie des propriétés physiques de l’océan Austral.
Dans sa majeure partie, l’océan Austral donne des signes évidents de changement. Depuis le milieu des années 60, un réchauffement estival rapide se produit le long de la côte orientale de la péninsule Antarctique, les températures atmosphériques à proximité de la surface ayant gagné plus de 2°C, ce qui a conduit à l’effondrement des deux parties septentrionales du plateau de glace de Larsen. On attribue ce réchauffement aux vents d’ouest qui sont devenus suffisamment forts en été pour que l’air chaud maritime parvienne depuis l’ouest à franchir la barrière que représente la péninsule. Le renforcement des vents d’ouest découle d’un déplacement du régime atmosphérique qui prévaut normalement, à savoir le mode annulaire austral (SAM), et qui passe alors en phase positive: les pressions de surface diminuent au-dessus de l’Antarctique tandis qu’elles augmentent sous les latitudes moyennes.
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Figure 1 — Circulation océanique générale centrée sur l’océan Austral au rôle essentiel (Lumpkin et Speer, 2006) |
Ce déplacement ainsi que le réchauffement rapide observé sur la face orientale de la péninsule Antarctique semblent découler d’un forçage par gaz à effet de serre de nature anthropique (Marshall et al., 2006).
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Il a été avancé que l’intensification du mode annulaire austral pourrait avoir entraîné un déplacement latitudinal du courant circumpolaire antarctique et une augmentation du volume que celui-ci transporte (Fyfe et Saenko, 2006). Les données d’observation tendent à prouver qu’il existe une relation étroite entre le volume transporté par ce courant et l’intensité du mode annulaire sur des échelles de temps allant de plusieurs jours à plusieurs semaines (Aoki, 2002; Hughes et al., 2003) voire à plusieurs années (Meredith et al., 2004). Certains font valoir cependant que l’évolution observée du régime des vents aurait plus probablement une influence sur l’évolution de l’activité tourbillonnaire circumpolaire que sur l’évolution du volume transporté par le courant circumpolaire antarctique (Meredith et Hogg, 2006).
Gille (2002, 2003) a montré l’existence, ces dernières décennies, d’un réchauffement à grande échelle d’environ 0,2°C touchant les eaux profondes du courant circumpolaire antarctique. En outre, il a fait apparaître récemment que ce réchauffement s’intensifie à la surface, où il atteint jusqu’à 1°C (Gille, 2007). Une partie du réchauffement pourrait être attribuée à un déplacement vers le sud des veines principales du courant circumpolaire, ce qui découlerait essentiellement d’une redistribution de la chaleur et non pas d’un réchauffement proprement dit; mais d’autres interprétations sont possibles. Cela pourrait s’expliquer par exemple par une intensification de l’activité tourbillonnaire dans l’océan Austral avec un transport de chaleur accru vers le sud, c’est-à-dire vers l’Antarctique, résultant d’un renforcement des vents d’ouest circumpolaires (Meredith et Hogg, 2006; Hogg et al., 2007).
Les modèles numériques les plus perfectionnés permettent de reproduire maintenant un réchauffement comparable à celui que l’on observe dans l’océan Austral et qui est plus rapide que dans les autres océans de la planète. Les analyses montrent que, sans l’effet obscurcissant des cendres volcaniques et autres aérosols, l’océan Austral serait encore plus chaud qu’il ne l’est aujourd’hui (Fyfe, 2006).
Dans l’océan Austral, on observe aussi un changement à l’échelle régionale. Robertson et al. (2002) ont trouvé que l’eau profonde chaude (WDW), couche située en mer de Weddell, avait gagné environ 0,3 °C. Boyer et al. (2005) ont noté de grandes diminutions de la salinité au sud de 70° S dans le secteur Pacifique de l’océan Austral et en mer de Weddell. L’adoucissement des eaux en mer de Ross a fait l’objet de relevés détaillés et on a observé aussi un adoucissement et un refroidissement relatif du plateau continental et de la partie supérieure du talus en mer d’Amundsen, au cours de la période allant de 1994 à 2000 (Jacobs, 2006). Ces eaux comprennent les eaux de source de l’eau de fond antarctique dans les secteurs Indien et Pacifique de l’océan Austral où l’on a donc observé un adoucissement rapide (Rintoul, 2007). Thompson et Solomon (2002) attribuent la diminution régionale de l’étendue des glaces en mer de Weddell et dans la région de la péninsule Antarctique à un effet de retrait des glaces dû à la température atmosphérique et découlant du déplacement du mode annulaire austral. On observe qu’un équilibre se crée entre la poursuite de la diminution de la surface des glaces de mer dans la région et l’augmentation de l’étendue des glaces en mer de Ross (Gloersen et al., 1992).
Sur la face occidentale de la péninsule Antarctique, le réchauffement semble lié à une diminution des glaces en mer de Bellingshausen adjacente, où l’on a observé un réchauffement estival des eaux de surface et proches de la surface de plus de 1°C, à un rythme plus élevé que la plupart des autres régions océaniques mondiales. La mer a aussi gagné en salinité en été. Ces changements sont tous deux des rétroactions positives qui accentuent la baisse de production de glace ainsi que le réchauffement atmosphérique. Pour que l’océan ne se réchauffe que près de la surface, il est probable que la cause soit atmosphérique et non pas océanique. La poursuite du réchauffement pourrait entraîner la disparition d’espèces et de populations du biote marin (Meredith et King, 2005).
Selon les simulations que la modélisation permet sur les 80 à 100 années à venir, il est probable que la zone marginale des glaces de mer se réchauffera l’hiver à un rythme pouvant atteindre jusqu’à 0,6°C par décennie. Il est prévu que la glace diminuera de 25 %. Les vents d’ouest se renforceront sur l’océan, principalement en automne, tandis que les vents d’est côtiers faibliront (Bracegirdle et al., sous presse).
Les observations dans l’océan Austral
Dans le cadre du GOOS, la CMOM est chargée de coordonner les observations régulières exécutées dans les océans, notamment polaires, grâce aux moyens actuels dont voici la liste:
- Le Programme de navires d’observation bénévoles (VOS) qui mesurent les propriétés de la surface océanique et de la basse atmosphère; un sous-ensemble de VOS, appelé VOSClim, fournit un sous-ensemble de données, auquel sont associées des métadonnées détaillées, qui présente une qualité répondant aux critères les plus élevés en matière d’observations climatologiques;
- Le Programme de navires occasionnels (SOOP) qui mettent à l’eau des bathythermographes non récupérables (XBT) pour mesurer la teneur en chaleur des couches supérieures de l’océan; il s’agit principalement de navires de recherche et de ravitaillement de l’Antarctique faisant route dans l’océan Austral;
- Le Système mondial d’observation du niveau de la mer (GLOSS) qui, grâce à des marégraphes et au système de positionnement global (GPS), mesure la hauteur du niveau de la mer dans le bassin Arctique et sur les côtes de l’Antarctique et de ses îles côtières et, grâce à des marégraphes de fond à capteur de pression, mesure la hauteur du niveau de la mer au-dessus du fond marin dans l’océan Austral;
- Le Programme international de bouées de l’Antarctique (IPAB) et le Programme international de bouées de l’Arctique (IABP) (tous deux groupes d’action du Groupe de coopération pour les programmes de bouées de mesure (DBCP)) mettent à l’eau des bouées qui dérivent avec les courants à la surface des océans, ou à la surface des glaces de mer, et recueillent des données sur les propriétés des eaux de surface et de la basse atmosphère; d’autres groupes d’action du DBCP, notamment le Programme mondial de flotteurs lagrangiens de surface, mettent à l’eau des bouées également dans l’océan Austral et dans les régions proches des pôles de tous les autres bassins océaniques;
- Dans les eaux libres de glace, le Programme de flotteurs Argo met à l’eau des flotteurs équipés d’instruments de mesure qui se déplacent dans l’océan à une profondeur de 1 000 ou 2 000 mètres; ces flotteurs remontent à la surface approximativement tous les dix jours pour établir un profil vertical de la température et de la salinité; une fois en surface, ils transmettent par satellite leurs données à une base, puis recommencent leur cycle de mesure;
- Le réseau de stations de référence pour les bouées, qui permet de recueillir des mesures portant sur les propriétés de l’océan dans une colonne d’eau au même emplacement plusieurs fois par an, ce qui permet d’établir l’évolution dans le temps;
- Les satellites de télédétection qui observent la surface des océans à l’aide de différents types d’instruments capables de mesurer les variations de l’étendue et des caractéristiques des glaces de mer, la hauteur de la surface des océans (par altimétrie), la température de la mer en surface (par radiométrie dans l’infrarouge), la rugosité de la surface de la mer (par diffusiométrie) et la couleur de la mer (par radiométrie dans le visible).
En mai 2007, le module du GOOS relatif au climat mondial était opérationnel à 58 %; il est prévu qu’il fonctionnera entièrement d’ici 2014, mais pour réaliser cet objectif, il faudra relever des défis de taille (Alverson et Baker 2006). Parvenir à couvrir l’ensemble de l’océan Austral est sans doute l’un des défis les plus considérables à relever (voir la figure 2). La surveillance de l’océan Austral constitue en effet un défi prodigieux si l’on tient compte de son isolement géographique, de la rigueur des conditions dans lesquelles il faut travailler — en particulier en hiver — et de son éloignement par rapport aux grands centres océanographiques et aux voies de navigation. Il faudra déployer beaucoup plus d’efforts qu’à l’heure actuelle si l’on veut que la situation présente s’agissant des observations aboutisse à un SOOS durable. En attendant, l’océan Austral représentera une lacune dans les connaissances dont on a besoin pour prévoir les changements climatiques avec précision.
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Figure 2 — Observations disponibles en temps quasi réel dans l’océan Austral et en Antarctique, au 23 juillet 2007 |
Au cours de l’API, des observations physiques de l’océan Austral seront exécutées par différents moyens, principalement grâce aux programmes mis en place à cette occasion dont la liste figure à la page suivante.
Programmes océanographiques mis en place au cours de l’API réalisant des mesures physiques
(A = Arctique; B = Bipolar; S = Antarctique)
8 (S) Interactions synoptiques au niveau du plateau et du talus continental
en Antarctique (SASSI)
13 (B) Étude du niveau de la mer et des marées dans les océans polaires
14 (A) Système intégré d’observation de l’océan Arctique (iAOOS)
23 (B) Circulation thermoaline bipolaire dans l’Atlantique (BIAC)
40 (A) .Développement de la modélisation et des capacités d’observation de l’Arctique pour des études environnementales à long terme (DAMOCLES)
70 (S) Surveillance de la circulation dans les couches supérieures de l’océan
entre l’Afrique et l’Antarctique
132 (S) Climat de l’Antarctique et de l’océan Austral (CASO)
141 (S) .étude des glaces en mer dans le cadre de l’API (ASPeCT)
153 (B) Exploration des océans par les mammifères marins d’un pôle à l’autre (MEOP)
305 (A) .Consortium for coordination of Observation and Monitoring of the Arctic for Assessment and Research (COMAAR)
379 (A) .IPY Operational Oceanography for the Arctic Ocean and adjacent seas (IPY Arctic GOOS)
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IPY 8: Interactions synoptiques au niveau du plateau et du talus continental en Antarctique (SASSI)
Dans le cadre de ce projet qui regroupe des scientifiques de 11 pays, il s’agira de mesurer la température, la salinité et le débit de l’eau le long du plateau et du talus continental de l’Antarctique, y compris en présence de glace, par petites coupes transversales, dites sections (voir la figure 3). Les scientifiques disposent de très peu de connaissances sur cette région et les nouvelles données revêtiront en outre une importance capitale pour l’amélioration des modèles du climat mondial.
Selon les quelques mesures dont on dispose depuis peu, il se pourrait que les eaux proches de l’Antarctique s’adoucissent. Mais d’où proviendrait ce surplus d’eau douce? Ce n’est qu’en procédant, en particulier en hiver, à des mesures des propriétés de l’eau et de sa vitesse d’écoulement que nous pourrons comprendre les processus en jeu pour en tenir compte avec exactitude dans nos modèles climatiques. Il n’existe aucun précédent d’effort concerté de mesures hivernales le long du plateau et du talus continental de l’Antarctique. Les activités conduites en collaboration au cours de l’API permettront notamment de laisser des instruments sur le fond marin et dans les eaux océaniques durant toute une année, et ce même lorsque les glaces couvriront la surface de la mer.
Chacune des nations participant au projet mettra des instruments à l’eau de sorte qu’il sera possible d’obtenir pour la première fois une couverture circumpolaire. Certains instruments mis à l’eau dans le cadre du projet SASSI pour permettre de recueillir des données durant l’API demeureront sur place après la fin de l’API, ce qui constituera l’une des retombées importantes de cet évènement pour l’avenir de la recherche.
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Figure 3 — Répartition par pays des sections et mouillages prévus au cours de l’API mettant en œuvre des bathysondes ainsi que des courantomètres à effet Doppler, dans le cadre du projet SASSI |
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IPY13: Étude du niveau de la mer et des marées dans les océans polaires
L’élévation du niveau de la mer sera l’un des effets les plus considérables — et les plus coûteux — de l’évolution du climat sur la société. Il est donc essentiel de réunir des données exactes sur le niveau des mers à l’échelle planétaire. Certes des centaines de stations assurent déjà un tel suivi dans le cadre du Système mondial d’observation du niveau de la mer mis en place par la COI et l’OMM, mais nous manquons cruellement de données dans les océans Arctique et Austral, car la mesure du niveau de la mer le long de côtes polaires éloignées représente un immense défi technique. En modernisant les marégraphes qui mesurent le niveau de la mer en Antarctique et en installant de nouveaux instruments perfectionnés dans l’Arctique et dans les îles de l’océan Austral, on pourra offrir aux scientifiques qui étudient l’élévation du niveau de la mer autour du globe la pièce manquant à leur puzzle. Les données sur le niveau de la mer pourront aussi servir à suivre les modifications de la circulation océanique sous les hautes latitudes, y compris la variabilité du transport attribué au courant circumpolaire antarctique (voir la figure 4), ce qui pourrait alors fournir des indications sur les causes de l’élévation du niveau de la mer.
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Figure 4 — Variabilité du transport volumique du courant circumpolaire antarctique (ACC) au passage de Drake, selon les mesures fournies par le marégraphe de la station de Faraday/Vernadsky située dans la péninsule Antarctique (panneau central); le panneau du haut fournit une indication de l’évolution des vents d’ouest circumpolaires dans l’océan Austral qui détermine les changements du volume transporté par l’ACC; le panneau du bas montre les variations correspondantes du transport selon un modèle océanographique mondial (Meredith et al., 2004) |
IPY 23: Circulation thermoaline bipolaire dans l’Atlantique (BIAC)
L’équipe internationale d’océanographes chargée du projet organisera des expéditions dans les océans polaires, à bord de navires capables de naviguer dans la glace, pour mesurer la température et la salinité de l’eau, les courants, ainsi que la formation et la répartition des glaces, en particulier en mers de Barents et de Weddell. Elle fera appel pour cela aussi bien à la télédétection qu’à des instruments ancrés sur le fond dont les données viendront alimenter les modèles numériques planétaires. Il s’agit d’évaluer l’incidence, sur la circulation océanique mondiale et sur le climat de la planète, de la formation d’eaux relativement denses dans les régions polaires. Des brise-glace seront équipés d’instruments les plus perfectionnés dans le domaine de l’étude de l’océan et des glaces de mer, et plus particulièrement de l’étude des mécanismes, des manifestations et des incidences de la formation d’eaux de fond sur les plateaux continentaux des pôles dans l’océan Atlantique.
IPY 70: Surveillance de la circulation dans les couches supérieures de l’océan entre l’Afrique et l’Antarctique
Contribution de l’Inde au projet CASO (voir ci-après)
Des scientifiques indiens se serviront de sondes XBT et XCTD (bathythermographes non récupérables et bathysondes non récupérables (de mesure de la conductivité, de la température et de la profondeur)) pour exécuter des observations dans le secteur Indien de l’océan Austral et pour cartographier ainsi l’état actuel et la variabilité interannuelle de l’environnement océanique. Ils étudieront la circulation océanique, les composantes zonale et méridienne du transport, le bilan thermique atmosphérique en surface et les échanges entre l’océan Pacifique et l’océan Indien; ils conceptualiseront la compréhension de la variabilité du climat. Ils suivront aussi les variations d’une année à l’autre par une répétition d’échantillonnages exécutés à bord des navires d’appui logistique aux expéditions indiennes dans l’Antarctique, faisant route entre l’Afrique et la station antarctique indienne de Maitri. D’autres travaux hydrographiques seront menés à bien dans les zones de formation des masses d’eau en mers de Ross et de Weddell et dans la zone subantarctique.
IPY 132: Climat de l’Antarctique et de l’océan Austral (CASO)
Le projet CASO vise à obtenir une image synoptique circumpolaire de l’environnement physique de l’océan Austral (grâce à la collaboration avec d’autres activités de l’API, cette image englobera aussi les domaines de la biogéochimie, de l’écologie et de la biodiversité). Le projet CASO vise aussi à améliorer la compréhension du rôle que l’océan Austral a tenu, tient et tiendra dans le système climatique, y compris les connexions entre les composantes zonale et méridienne de la circulation dans l’océan Austral, la transformation des masses d’eau, la variabilité atmosphérique, les interactions océan-cryosphère, les relations entre les composantes physiques, biogéochimiques et écologiques, et les téléconnexions entre les latitudes polaires et les latitudes plus basses.
Les objectifs du projet sont les suivants:
- Améliorer les prévisions climatiques, à partir de modèles qui intègrent une connaissance plus approfondie des processus en jeu dans la région du pôle Sud;
- Valider le concept d’un système d’observation durable et rentable dans la région du pôle Sud (observation de l’océan, de l’atmosphère et de la cryosphère);
- Établir des valeurs de référence pour l’évaluation des changements futurs.
- Le projet CASO repose sur la réalisation de plusieurs grands programmes sur le terrain:
- Un ensemble circumpolaire de sections hydrographiques et de sections XBT/XCTD pour des mesures multidisciplinaires allant jusqu’au plancher océanique, à partir du continent Antarctique et vers le nord, transversalement au courant circumpolaire antarctique, y compris dans les régions essentielles où se forment les masses d’eau;
- Un réseau circumpolaire renforcé, composé de bouées dérivant avec les glaces de mer pour mesurer une série de paramètres ayant trait aux glaces, à l’océan et à l’atmosphère;
- Des flotteurs profileurs mis à l’eau partout dans l’océan Austral, y compris des flotteurs à positionnement acoustique pour les zones couvertes de glace;
- Des mouillages équipés de courantomètres pour fournir des séries chronologiques de données sur les propriétés des courants et des masses d’eau océaniques dans les passages les plus importants, dans les zones d’action des modes de variation prédominants et dans les zones où les eaux de fond se forment et se déchargent;
- Des capteurs environnementaux fixés aux mammifères marins;
- Des mesures directes des mélanges diapycnal et isopycnal dans l’océan Austral;
- Des analyses de carottes de glace, de carottes de sédiments et de coraux profonds pour étendre l’observation des variations de l’océan Austral au-delà de l’ère des instruments;
- Des marégraphes de fond à capteur de pression disposés près du passage de Drake pour étudier les courants océaniques, valider les modèles de marées et améliorer les corrections à apporter pour la région aux produits altimétriques des satellites;
- Des stations météorologiques automatiques, des mesures de flux dans la couche limite et des bouées dérivantes pour mesurer les variations atmosphériques (la pression, le vent, les flux de chaleur et les flux d’eau douce).
IPY153: Exploration des océans par les mammifères marins d’un pôle à l’autre (MEOP)
FIGURE 5
La collecte de données océanographiques dans des eaux polaires prises par les glaces est une activité onéreuse et qui présente des difficultés d’ordre logistique. Le projet ne repose pas uniquement sur des scientifiques, il fait appel aussi aux explorateurs des mers que sont les belugas et les phoques de quatre espèces différentes pour recueillir des données sur la conductivité (salinité), la température et la profondeur dans les eaux arctiques et antarctiques. Grâce aux balises miniaturisés de dernière génération qu’ils fixeront sur des dizaines de ces mammifères marins, les scientifiques pourront dresser un nouvel ensemble de données provenant de plongées profondes, ce qui élargira les connaissances sur les océans de la planète ainsi que sur le comportement des grands prédateurs qui les peuplent.
Le projet MEOP constituera une source unique de données essentielles à la fois physiques et biologiques recueillies dans les océans polaires. La méthode employée viendra compléter les efforts déployés dans d’autres projets mis en oeuvre dans le cadre de l’API et aura des retombées tant par l’utilité des données biologiques et océanographiques recueillies que par les nouvelles techniques utilisées pour comprendre les interactions entre les prédateurs marins et leur écosystème.
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Figure 5 — Déplacements des éléphants de mer équipés de balises permettant d’enregistrer des profils de température et de salinité dans l’océan Austral
(Biuw et al., 2007) |
La figure 5, qui montre la zone couverte par les données recueillies dans l’océan Austral grâce à cette même méthode entre 2004 et 2006, donne un exemple de l’immense potentiel envisagé pour les systèmes d’observation océanographique dans les régions polaires.
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IPY 141: Étude des glaces en mer dans le cadre de l’API (ASPeCt)
Ce programme d’étude des glaces de mer établira une référence quantitative de l’épaisseur de la glace circumpolaire qui permettra la comparaison entre les distributions de l’épaisseur de la glace obtenues à partir des observations fournies par les navires d’une part et à partir des observations altimétriques validées fournies par les satellites d’autre part. Il sera possible ensuite d’évaluer du point de vue quantitatif la couverture de glaces de mer en Antarctique en rapport avec les changements climatiques planétaires futurs. La mise au point d’une technologie permettant de suivre l’évolution de l’épaisseur des glaces de mer en Antarctique à partir de satellites représentera l’une des principales retombées du programme; cette technologie pourra servir en outre à déceler les variations interannuelles ou sur des durées plus longues de la couverture des glaces de mer en Antarctique après la fin de l’API.
Un Système intégré d’observation de l’océan Arctique (iAOOS)
Concordance des changements arctiques et subarctiques
En procédant à une reconstruction des températures de la couche d’eau atlantique dans l’océan Arctique sur l’ensemble du siècle écoulé, ce que Polyakov et al. (2004) ont réalisé (voir la figure 6), on est surpris de s’apercevoir que, malgré une grande variabilité de la densité des données sur le plan temporel, chacun des principaux épisodes de l’historique hydrographique de la mer de Norvège au cours de cette période (Dickson et Osterhus, 2007, par exemple) se trouve représenté. Ainsi en mers de Norvège et de Barents (voir Helland Hansen et Nansen, 1909), la série commence par des conditions extrêmement froides à peu près au début de siècle dernier, enregistrées par Nansen (1902) au cours de la longue dérive polaire du Fram. Cette phase est clairement suivie d’une période de réchauffement durable après les années 20, qui concorde avec le réchauffement dans le Nord qui a envahi le tourbillon subpolaire de l’océan Atlantique (analyse dans Dickson, 2002). Puis, un brusque refroidissement vient de nouveau s’imposer à la fin des années 60 et au début des années 70, qui accompagne le passage de la grande anomalie de salinité dans le tourbillon subpolaire et le déplacement associé du front océanique polaire vers une position extrême au sud-est. Une succession de réchauffements progresse ensuite le long de la bordure orientale pour produire les conditions les plus chaudes du siècle dans la sous-couche de l’océan Arctique provenant de l’Atlantique, à savoir une augmentation de 9 % de la teneur en chaleur de la couche d’eau atlantique entre les années 70 et les années 90, d’après Polyakov et al. (2004, 2005).
La figure 6 tend à montrer que nous sommes en présence d’un changement touchant l’ensemble du système océanique arctique et subarctique, que les mers subarctiques n’ont cessé de jouer le rôle de sources relativement aux variations multidécennales subies par l’Arctique au cours du siècle écoulé, que l’ensemble complexe des causes responsables de ces variations dans les mers septentrionales a contribué à modifier la température de la couche d’eau atlantique et que l’apport de chaleur de la mer de Norvège vers l’océan Arctique semble se poursuivre. L’équilibre des eaux douces dans l’Arctique entre bien sûr dans ce changement. D’après Hakkinen et Proshutinsky (2004), les modifications touchant les eaux provenant de l’Atlantique suffisent à expliquer presque toutes les anomalies que présentent les eaux douces dans le bassin arctique selon les simulations.
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Figure 6 — Comparaison sur un siècle entre la température de la couche d’eau atlantique (AWCT) en subsurface dans l’océan Arctique, la moyenne mobile corrigée sur six ans de la température à 10 mètres de profondeur relevée à la station météorologique océanique Mike (66° N, 2° E) en mer de Norvège et les anomalies corrigées de la température de la mer en surface (SST) dans l’océan Atlantique pour la zone de 0 à 90° N et de 70° O à 30° E (avec l’aimable autorisation de Polyakov et al., 2004). |
L’Année polaire internationale et bien évidemment beaucoup de programmes de recherche qui y contribuent ont pour thème central le sort de la couverture permanente de glaces de mer dans l’Arctique. Premièrement, la plupart des simulations numériques du système océanique, sous un climat correspondant à une augmentation de la concentration des gaz à effet de serre, prévoient un affaiblissement de la circulation thermoaline dans l’Atlantique Nord — le fameux «tapis roulant» — sous l’influence d’un adoucissement et d’un réchauffement des mers subpolaires (parmi les principales étapes de ce travail de prévision, on pourrait citer le travail de pointe en modélisation réalisé par Bryan (1986) et Manabe et Stouffer (1988), puis les travaux de Rahmstorf et Ganopolski (1999), Delworth et Dixon (2000) et Rahmstorf (2003) qui parviennent à une complexité intermédiaire, et jusqu’à ceux entrepris par Mikolajewicz et al. (2007) qui modélisent le système terrestre dans toute sa complexité). Par ailleurs le recul de la banquise au cours des trois dernières décennies (voir la figure 7) aura contribué au vaste déversement d’eau douce de l’Arctique vers l’Atlantique qui remonte au milieu des années 60 (Curry et Mauritzen, 2005). Deuxièmement, il est possible d’anticiper des changements radicaux touchant l’écosystème de l’océan Arctique et des mers subarctiques à la suite du recul, de l’amincissement, voire peut-être de la disparition de la banquise permanente. Le compte rendu de l’évaluation de l’impact du climat dans l’Arctique (ACIA), publié récemment, indique qu’une augmentation de 250 % de la production primaire pourrait découler de la disparition du facteur obscurcissant de la glace dans les zones actuellement couvertes de glaces pérennes. Troisièmement, il semble probable que la réduction de l’albédo de l’océan Arctique, d’une valeur supérieure à 0,8 à une valeur inférieure à 0,2, sur une superficie de la taille de l’Europe, équivalant au rétrécissement total prévu de la banquise à la fin de l’été, aura une incidence sur le climat à l’échelle tant régionale que mondiale.
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Figure 7 — Étendue des glaces de mer en septembre dans l’hémisphère Nord, obtenue par télédétection en hyperfréquences passives, montrant un déclin sur une longue période dont la valeur basse record se situe en 2005 (source: Mark Serreze et Julienne Stroeve, Centre national des données sur la neige et la glace, Boulder, Colorado, (États-Unis d’Amérique), communication personnelle,
juillet 2007).
(see http://nsidc.org/news/press/2007_seaiceminimum/20070810_index.html
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Compte tenu de l’importance du spectre des effets environnementaux et climatiques en jeu, il n’est pas surprenant que les grands efforts de recherche entrepris dans l’Arctique au cours de l’API aient tous pour thème principal l’état actuel ou futur des glaces de mer pérennes. Citons notamment le projet DAMOCLES à moyen terme (concernant 45 instituts de recherche répartis dans douze pays européens et fonctionnant en coordination avec le Canada, le Japon, la Fédération de Russie et les États-Unis d’Amérique), l’Étude de l’évolution du milieu arctique (SEARCH) à long terme lancée par la Fondation nationale pour la science des États-Unis d’Amérique, mais aussi de nombreux autres efforts de recherche déployés à l’échelon national, tels que le Programme d’étude océanographique synoptique à l’échelle du bassin arctique (ASBO) du Royaume-Uni ou le programme phare norvégien « iAOOS-Norvège ». (Il convient de noter que le Système intégré d’observation de l’océan Arctique (iAOOS) n’est pas un programme à part entière, au financement acquis, mais plutôt un cadre panarctique devant favoriser l’atteinte d’un degré de coordination optimal entre les projets financés à l’occasion de l’API et ayant lui-même pour thème central les glaces de mer en Arctique; voir Dickson, 2006.)
Faute de place, nous ne fournissons dans le présent article qu’un bref aperçu du caractère extrême de l’état actuel des eaux salées et chaudes qui pénètrent le long des bordures des mers septentrionales vers le pôle, avant de décrire les plans dressés pour comprendre l’évolution de la couverture de glaces de mer dans l’océan Arctique.
Des eaux d’une chaleur extrême envahissent récemment la bordure orientale de la mer de Norvège — Le système des processus interconnectés qui en sont la cause
Très récemment, la température et la salinité des eaux qui pénètrent en mer de Norvège le long du plateau et du talus continental de l’Écosse ont atteint les valeurs les plus élevées enregistrées depuis plus d’un siècle. À l’autre extrémité de cette veine de circulation entrant en mer de Norvège, les températures le long de la section de Kola en mer de Barents (33° 30’ E) exécutée par la Fédération de Russie, elles aussi, n’ont jamais atteint des valeurs aussi élevées depuis plus d’un siècle, ce que révèlera le rapport du CIEM sur le climat de l’océan en 2006, actuellement sous presse. Ces eaux chaudes ont également été décelées par des relevés de plus courte durée, exécutés dans le passage même du courant et au-delà, par le réseau de mouillages norvégiens au large de Svinoy (Skagseth et al., sous presse), par le réseau de mouillages situé dans le détroit de Fram (Schauer et al., sous presse) et par les mouillages du Système d’observation des bassins de Nansen et d’Amundsen (NABOS) que dirige Polyakov, sur l’escarpement de la mer de Laptev (Polyakov, 2005; 2007); Holliday et al. (2007) ont aussi décrit leur prolongement le long de la bordure océanique. Overpeck s’appuie notamment sur ce phénomène pour déclarer en 2005 qu’il est fort possible que, dans moins d’un siècle, l’océan Arctique sera libre de glaces durant l’été, une situation que la planète n’a pas connue depuis au moins un million d’années.
Mais quelles sont les raisons d’un changement aussi radical dans l’ensemble du système océanique? Les observations par satellites semblent fournir une explication plausible: tout au long de la période de fonctionnement de TOPEX-POSEIDON (depuis 1992), au fur et à mesure que les eaux de la mer du Labrador se sont réchauffées (Yashayaev et al., sous presse), les relevés altimétriques ont révélé une lente montée du niveau de la surface de la mer au centre du tourbillon subpolaire de l’Atlantique Nord, ce qui laissait penser à un affaiblissement progressif de la circulation giratoire (Hakkinen et Rhines, 2004, sous presse). Cet affaiblissement s’accompagne d’une rétraction vers l’ouest de la limite du tourbillon, ce qui semble avoir fonctionné comme un commutateur qui commanderait l’entrée d’eaux chaudes et salées dans les mers nordiques (Hatun et al., 2005). Selon ce mécanisme, quand le tourbillon est intense et qu’il s’étend vers l’est (début des années 90), le courant entrant s’alimente directement dans les eaux relativement froides et douces du tourbillon subpolaire, mais quand il faiblit et se déplace vers l’ouest (comme au cours des années 2000), le courant entrant dans les mers nordiques parvient à s’alimenter en eaux relativement chaudes et salées provenant du tourbillon subtropical, ce qui explique l’augmentation récente de la température et de la salinité des eaux atlantiques qui pénètrent en mer de Norvège. Ainsi, bien que les conditions locales et de courte durée aient probablement eu un rôle à l’ouest de la Norvège — la vitesse du courant atlantique étant fonction localement de la force des tempêtes (Skagseth et al., sous presse) — la source première des changements observés dans l’océan Arctique semble reposer dans un système global d’interactions entre les bassins polaire et subpolaire. Les causes en jeu, qu’elles soient proches ou éloignées, de courte ou de longue durée, ont fait en sorte que le bassin polaire soit régulièrement approvisionné en eau de plus en plus chaude par l’intermédiaire des mers subarctiques.
Nous ne faisons que commencer à entrevoir un élément de preuve de l’existence de ce système dans les observations que nous recueillons. Toutefois, les résultats fournis par les modèles semblent aussi soutenir l’opinion selon laquelle il convient d’étudier en simultanéité le système d’échange entre l’océan Arctique et l’océan Atlantique, dans toute son étendue sur l’ensemble des latitudes, et non pas simplement de façon ponctuelle par échantillonnage, si nous voulons comprendre toute la subtilité du rôle des mers septentrionales par rapport au climat mondial. Selon la conclusion que Jungclaus et al. (2005) donnent à leurs expériences conduites à l’aide des modèles de Hambourg ECHAM5 et MPI-OM, bien que l’intensité de la cellule méridienne de circulation dans l’Atlantique soit liée à l’activité de convection dans les régions de formation des eaux profondes, tout particulièrement en mer du Labrador, les fluctuations sont entretenues par un effet réciproque entre le stockage et le déversement d’eau douce à partir du centre de l’Arctique et les modifications de la circulation dans les mers nordiques causées par les variations du transport de chaleur et de sel dans les eaux atlantiques.
De l’espace aux fonds marins, un empilement de moyens d’observations destiné à l’étude iAOOS de l’océan Arctique
Les observations directes des glaces de mer et de leurs facteurs de régulation dans l’océan Arctique constituent une composante fondamentale de l’iAOOS et de ses programmes. Comme le montre la figure 7, nous avons récemment obtenu de fortes indications de changements profonds touchant l’étendue et l’épaisseur de la banquise arctique (exemples: Comiso, 2002; Rothrock et al., 2003; Serreze, 2003), mais les processus responsables d’une telle évolution sont loin d’être élucidés. Dans le cadre de l’initiative iAOOS, l’ensemble des relevés qui seront effectués dans l’océan Arctique même: sondages de l’atmosphère, de la glace de mer, de la surface de l’océan et de la couverture de neige terrestre, grâce aux satellites, aux navires de surface, aux camps habités sur la banquise, aux plates-formes autonomes (ITP) fixées à la glace et aux bouées de la série ICEX du programme IABP (voir la figure 8), représentera une nouvelle approche concertée en ce qui concerne l’étude de l’état et du devenir de la banquise arctique et de son rôle dans le système climatique européen et mondial.
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Figure 8 — Schéma représentant l’empilement des moyens d’observation, depuis les satellites jusqu’aux capteurs de fond, dont on pense qu’il est indispensable pour recueillir les informations devant servir à l’étude iAOOS des conditions présentes et du devenir de la glace de mer pérenne dans l’Arctique (pour obtenir davantage de détails, voir Dickson 2006) |
Dans le domaine atmosphérique, les objectifs fixés par le projet DAMOCLES permettront de mieux détecter les dépressions arctiques et de quantifier leur contribution au transport de chaleur et d’humidité; de comprendre et de modéliser les processus et les flux turbulents propres à la couche limite atmosphérique au-dessus de l’océan Arctique; de comprendre et de modéliser la formation et le cycle des nuages arctiques, les transferts radiatifs dans l’atmosphère arctique et leurs relations avec l’albédo des surfaces de glace et de neige. L’altimétrie laser et radar par satellite continuera de fournir des estimations de l’épaisseur de la glace à partir de mesures directes du franc-bord (Laxon et al., 2003). Au-dessus de la glace, les lasers aéroportés et les capteurs électromagnétiques héliportés fourniront des données locales précises pour étalonner et valider les mesures du franc-bord des glaces obtenues par satellite. À la surface de la glace un réseau d’une douzaine de bouées à inclinomètre, mises au point par Wadhams et ses collègues, mesurera le spectre des ondes de gravité opérant en flexion, qui se propagent au travers de la glace, pour fournir ainsi un relevé nouveau et indépendant de l’épaisseur de la banquise. Ces instruments transmettent en outre les spectres établis après traitement ou les données brutes par l’intermédiaire d’un satellite à orbite basse (Iridium). Au-dessous de la banquise, des véhicules sous-marins autonomes et des flotteurs fonctionnant avec grande précision à pression constante seront équipés de sonars dirigés vers le haut pour fournir des mesures qui viendront renforcer la validation des estimations de l’épaisseur de la banquise obtenues par satellite, tandis qu’un petit ensemble de capteurs de pression de fond dispersés dans les fonds du bassin arctique (voir la figure 8) fournira la réalité de terrain indispensable pour établir des estimations de la circulation dans l’océan Arctique à partir des télémesures de la hauteur de la surface de la mer.
Certes tous ces systèmes sont nouveaux, mais soit ils sont déjà au point, soit le projet aboutira sous peu, et, en les employant, nous pourrons pour la première fois obtenir des mesures directes ou des estimations validées de la circulation, de la stratification et du volume de glace dans l’océan glacial Arctique, selon une résolution temporelle mensuelle à saisonnière.
Une mise en place en cours
C’est en avril 2007 que l’API a débuté et que nous sommes passés de l’étape de la planification initiale à la phase consistant à réunir toutes les différentes techniques issues des diverses collaborations pour que le cadre iAOOS envisagé se transforme en un véritable programme reposant sur des financements établis. La mise en oeuvre à l’échelle panarctique de telles études à caractère original constitue un défi passionnant à relever, ce dont le lecteur se laissera convaincre par les deux exemples que voici.
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Figure 9 — Observations disponibles en temps quasi réel dans l’Arctique et dans les régions subarctiques, au 23 juillet 2007 |
Premièrement, dans le cadre de la composante DAMOCLES de l’iAOOS, il est prévu d’utiliser un grand ensemble intégré de flotteurs et d’hydroplaneurs (voir la figure 10) pour obtenir des profils sous-marins dans la colonne d’eau supérieure de l’océan Arctique (surtout dans les 800 premiers mètres sous la surface, certains sondages pouvant atteindre deux kilomètres de profondeur), ce qui permettra d’explorer tant l’halocline froide (voir la figure 8) que la sous-couche provenant de l’Atlantique et d’en décrire les variations. Les vecteurs transmettront leurs données aux satellites et recevront des paramètres de commande de mesures et de navigation par l’intermédiaire d’un réseau de plates-formes fixées sur la banquise (ITP). Comme différents types d’ITP ont été proposés (SEARCH, NOAA et Institut océanographique de Woods Hole (WHOI) aux États-Unis d’Amérique et DAMOCLES en Europe), leur mode de fonctionnement, leur mise en place, leurs systèmes de communication et de traitement de données nécessitent une coordination. Certaines ITP auront pour mission de mettre à l’eau, dans la colonne d’eau supérieure, des profileurs pour la mesure de la conductivité, de la température et de la profondeur et de recueillir des observations sur la structure verticale des courants océaniques à l’aide de profileurs de courant à effet Doppler, tout en assurant un rôle plus classique, celui de recueillir des données météorologiques à la surface de la banquise.
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Figure 10 — Système d’observation de l’océan Arctique en cours de mis en place par le projet intégré DAMOCLES du sixième programme-cadre de la Communauté européenne. Un ensemble élargi de flotteurs et d’hydroplaneurs explorera la couche supérieure de l’océan; ces vecteurs transmettront leurs données aux satellites et recevront des paramètres de commande de mesures et de navigation par l’intermédiaire d’un réseau de plates-formes fixées sur la banquise. |
Deuxièmement, la figure 11 illustre le résultat de l’effort de collaboration récemment accompli entre les différents projets indiqués dans la légende et notamment le programme phare ASBO du NERC (Royaume-Uni), l’étude NABOS dirigée par Igor Polyakov (IARC, Fairbanks), le projet d’exploration du courant giratoire en mer de Beaufort dirigé par Andrey Proshutinsky (WHOI) et le programme SPACE dirigé par Ursula Schauer (Étude synoptique du climat et de l’environnement panarctique, Institut Alfred Wegener (AWI), Bremerhaven).
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Figure 11 — Projets iAOOS de collaboration en océanographie dans l’océan Arctique à l’été 2007 |
Dans le cadre de cette collaboration, les projets d’étude visent essentiellement à quantifier la glace et la teneur en eau douce de l’océan Arctique. Les panneaux à droite de la figure 11 sont des cartes de hauteur: l’altimètre radar du satellite Envisat (jusqu’à 81,5° N) et le système laser du satellite ICESat (jusqu’à 86° N) fourniront, outre l’épaisseur de la banquise, l’épaisseur de la couche de neige par la différence entre les deux mesures, celle du laser qui mesure la hauteur de la couche de neige et celle du radar qui mesure la hauteur de la couche de glace. La section transarctique (États-Unis d’Amérique-Royaume-Uni) entreprise à bord du puissant brise-glace russe Yamal (carte principale) contribue à établir le lien entre la marge continentale sibérienne orientale et la marge eurasienne (projet SPACE de l’AWI), ce qui permettra de représenter l’Arctique sous forme de boîtes et d’avancer ainsi des calculs prudents pour l’ensemble de l’océan Arctique. Les panneaux situés à gauche de la figure apportent une nouvelle exaltante (Seymour Laxon, Andy Ridout et Andrey Proshutinsky; communication personnelle): une première comparaison de la hauteur de la surface de la mer déduite des données obtenues grâce aux marégraphes de fond en mer de Beaufort et de celle fournie par le radar altimétrique d’Envisat montre qu’il est maintenant possible, même en présence de glace, d’extraire la topographie dynamique de l’océan au centimètre près (et par conséquent de mesurer la circulation dans l’océan Arctique).
Nous ne disposons pas d’assez d’espace ici pour fournir davantage de détails sur le grand nombre de nouveaux systèmes originaux qui seront mis en œuvre au cours de l’API dans les mers nordiques. Les deux exemples qui précèdent fournissent cependant une idée de l’ampleur des progrès scientifiques qu’il semble possible de réaliser lorsqu’on décide de s’atteler à un problème, en l’occurrence celui des mers septentrionales et des changements qu’elles subissent, et d’y consacrer, durant une période donnée, les ressources humaines, le matériel et les heures-navires nécessaires, à savoir des conditions qui ne peuvent être réunies qu’au cours d’une Année polaire internationale et qui le seront grâce à l’iAOOS.
Planification des retombées
L’intérêt que revêt la mise en place d’un système d’observation de l’océan Austral (SOOS) en tant que retombée de l’API a été examiné le 15 juillet 2006, lors d’un atelier spécialement organisé à Hobart (Australie), sous le parrainage du SCAR, du Partenariat pour l’observation des océans (POGO) et du Programme de recensement de la faune marine antarctique (CAML). Les participants, ayant jugé qu’il serait tout à fait souhaitable de créer un SOOS, ont constitué un comité de planification dans ce but. Le 13 octobre 2007 se tiendra à Brême (Allemagne) un atelier au cours duquel seront rédigées les grandes lignes d’un plan d’élaboration du SOOS. Ce plan recevra une large diffusion pour consultation avant d’être affiné à l’occasion d’un nouvel atelier qui aura lieu à Saint-Pétersbourg (Fédération de Russie) en juillet 2008 (en association avec la trentième réunion du SCAR). Il sera enfin publié vers la fin de 2008. Le document établira le programme d’action scientifique à mener dans le cadre d’un tel SOOS. Il appartiendra ensuite aux différentes nations ayant des intérêts dans l’océan Austral et aux organisations, comme la COI et l’OMM, de décider de la meilleure façon de mettre en œuvre ce plan.
Parallèlement, des nations ont franchi de grands pas vers la création d’un système d’observation de l’Arctique (Lyons et al., 2006), avec la contribution des alliances régionales du GOOS, notamment l’EuroGOOS, de groupes internationaux, notamment le Comité scientifique international de l’Arctique et le Conseil scientifique de l’océan Arctique, et bien sûr des organismes nationaux des États membres concernés. Lors de sa vingt-quatrième Assemblée, en 2007, la COI a adopté une résolution au sujet du Programme d’action du GOOS, qui comprend la décision de renforcer les plans et les engagements en faveur de la création de réseaux d’observation océanique durables dans les régions polaires, qui constitueraient des retombées de l’Année polaire internationale. L’élan initial nécessaire à l’application de cette résolution sera donné sans nul doute par les nouveaux résultats et les surprises que nous réserve une telle concentration d’efforts centrés sur l’observation dans les deux océans polaires.
Conclusions
Les océans polaires restent manifestement parmi les régions les moins étudiées. Il sera impossible de parvenir à un GOOS et un SMOC donnant pleine satisfaction dans leur exploitation tant que nous n’aurons pas trouvé de moyens permettant une observation des océans polaires régulière, d’un bon rapport coût-efficacité et offrant une couverture suffisante, afin que l’océanographie et la météorologie maritime déterminent les principaux processus en jeu qui contribuent notamment à la variabilité du climat. Dans l’océan mondial, les régions polaires sont en outre celles qui subissent les changements les plus rapides en réaction au réchauffement planétaire. Il faut donc impérativement que nous puissions dès à présent suivre cette évolution rapide, signe avant-coureur probable de futures modifications ailleurs sur la planète, dont les conséquences éventuelles devraient nous alerter. Compte tenu de l’attitude très prudente adoptée par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat dans ses prévisions s’agissant de l’évolution du niveau des mers au cours des 100 ans à venir et du fait que la fonte des glaces déclenchée par le réchauffement océanique risque de conduire à un changement bien plus rapide et plus extrême (élévation pouvant atteindre plus de cinq mètres; Hansen, 2007) au cours de la même période, il nous incombe d’accorder davantage d’importance à l’étude approfondie des océans polaires.
Remerciements
Nous tenons à remercier Karen Heywood et Kevin Speer dont les remarques, les suggestions et les indications ont grandement amélioré la qualité de notre article.
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1. Directeur exécutif, Comité scientifique pour la recherche antarctique, Institut de recherche polaire Scott, Cambridge (Royaume-Uni), cps32cam [dot] ac [dot] uk (cps32[at]cam[dot]ac[dot]uk)
2. Président, Étude internationale des flux océaniques arctiques et subarctiques, Centre des sciences environnementales, halieutiques et aquacoles, Lowestoft (Royaume-Uni), bob [dot] dicksoncefas [dot] co [dot] uk (bob[dot]dickson[at]cefas[dot]co[dot]uk)
3. Chef du Groupe atmosphère et océan, Service britannique d’études antarctiques, Cambridge, (Royaume-Uni), mmmbas [dot] ac [dot] uk (mmm[at]bas[dot]ac[dot]uk)
4. Coprésident de la Commission technique mixte OMM/COI d’océanographie et de météorologie maritime (CMOM), Section des services océanographiques, Service météorologique australien, Melbourne (Australie), p [dot] dexterbom [dot] gov [dot] au (p[dot]dexter[at]bom[dot]gov[dot]au)
5. Directeur, Bureau du projet GOOS, COI/UNESCO, Paris (France), k [dot] alversonunesco [dot] org (k[dot]alverson[at]unesco[dot]org)