Projet de prévision infrasaisonnière à saisonnière: Faire la soudure entre le temps et le climat

01 novembre 2012

par Frédéric Vitart1, Andrew W. Robertson2 et David L. T. Anderson1

L’élaboration et l’application des prévisions météorologiques à moyenne échéance et des prévisions climatiques à échéance saisonnière ont marqué de nets progrès ces dernières décennies. Dans le cadre du Projet de prévision infrasaisonnière à saisonnière, les spécialistes du temps et du climat étudieront ensemble cette échelle de temps intermédiaire; ils mettront à profit les connaissances et compétences communes et complémentaires qui ont été acquises en matière de prévision, de recherche et d’application en vue de mettre au point des systèmes de prévision météorologique/climatique plus continus et des services qui intègrent mieux ces deux domaines.

Du point de vue de la société, une foule de décisions de gestion touchant l’agriculture, la sécurité alimentaire, les ressources en eau, la réduction des risques de catastrophes et la santé tombent dans la plage infrasaisonnière à saisonnière. Pourtant, cette échelle a longtemps été considérée comme «un désert de prévisibilité» et a été beaucoup moins étudiée que la prévision à échéance moyenne et saisonnière. Les recherches récentes ont montré que la prévisibilité dans cette plage temporelle pourrait être grandement améliorée grâce à plusieurs facteurs: meilleure compréhension et représentation de phénomènes atmosphériques tels que l’oscillation de Madden–Julian, amélioration de l’initialisation et du couplage avec les terres émergées-l’océan-la cryosphère et la stratosphère, mise au point de nouveaux modèles, disponibilité de réseaux d’observation plus étoffés et plus fiables, affinement des techniques d’assimilation des données et élargissement des moyens de calcul. Ces avancées devraient se traduire par des prévisions plus exactes.

Plusieurs articles récents (Brunet et al. 2010, par exemple) insistent sur l’importance et sur la nécessité d’établir une collaboration entre les spécialistes du temps et du climat pour analyser des questions cruciales communes et, plus précisément, faire progresser la prévision infrasaisonnière à saisonnière. À sa quinzième session, en novembre 2009, la Commission des sciences de l’atmosphère de l’OMM a prié les comités scientifiques mixtes pour le Programme mondial de recherche sur la prévision du temps (PMRPT) et le Programme mondial de recherche sur le climat (PMRC) ainsi que le Comité directeur international restreint pour le programme THORPEX3 de mettre sur pied un mécanisme de collaboration afin de lancer une initiative internationale de recherche sur la question. Elle a en outre recommandé d’assurer une coordination avec le Cadre mondial pour les services climatologiques. Un plan de mise en oeuvre4 a été élaboré, sur lequel repose le présent article.


Les besoins sur le plan des applications

La société n’est pas à l’abri des phénomènes météorologiques et climatiques en dépit des progrès et des investissements considérables qui ont été effectués depuis un siècle dans la connaissance scientifique et l’application opérationnelle des prévisions. Les dangers liés au temps, y compris le début précoce ou tardif de la saison des pluies et l’installation de phénomènes chroniques tels que la sécheresse et les longues périodes de froid ou de chaleur extrême, sont responsables d’une bonne partie des pertes imputables aux catastrophes. L’échelle infrasaisonnière est importante pour les utilisateurs finaux car elle se situe entre l’application courante et éprouvée des prévisions météorologiques dans divers secteurs, d’une part, et l’utilisation élargie des prévisions saisonnières, d’autre part. Un grand nombre de décisions de gestion, dans le domaine de l’agriculture par exemple, portent sur une échelle intermédiaire, allant de deux semaines à deux mois. La mise au point de prévisions plus continues entre le temps et le climat devrait donc présenter un grand intérêt sur le plan sociétal et augmenter le nombre de régions ou de situations dans lesquelles on dispose d’informations concrètement utilisables. En ce sens, le Projet est considéré comme une contribution précieuse du PMRC et du PMRPT au Cadre mondial pour les services climatologiques.

Le temps et le climat s’inscrivent dans un continuum temporel et les prévisions établies à différentes échéances viennent appuyer diverses catégories de décisions et d’alertes précoces. En réduisant l’échelle temporelle d’une prévision saisonnière, qui peut orienter le choix d’une culture, l’information infrasaisonnière permettrait d’optimiser les calendriers d’irrigation et l’épandage de pesticides ou d’engrais, avec des effets bénéfiques pour l’environnement. Si l’on utilise déjà des prévisions saisonnières, l’information infrasaisonnière pourrait servir à effectuer des mises à jour, par exemple concernant l’estimation des rendements agricoles en fin de saison. En augmentant l’échelle temporelle des applications de la prévision numérique du temps par les utilisateurs, il serait sans doute possible d’étendre, entre autres, les délais de la prévision des crues avec les modèles hydrologiques pluie-ruissellement. Au titre de l’aide humanitaire et de la préparation aux catastrophes, l’Institut international de recherche sur le climat et la société, qui relève du Centre du changement climatique de la Croix-Rouge, a préconisé une approche «À vos marques-Prêts-Partez» pour l’emploi des prévisions météorologiques à l’échelle saisonnière. À partir des prévisions saisonnières, il suit les prévisions infrasaisonnières et à courte échéance, actualise les plans d’urgence, forme des bénévoles et met en place des systèmes d’alerte précoce («À vos marques»); les prévisions inframensuelles permettent d’alerter les bénévoles et les populations («Prêts»); enfin, les prévisions météorologiques servent à déclencher l’alerte, lancer l’intervention, donner des instructions aux populations et procéder éventuellement à une évacuation («Partez»).

La réussite, même quand il existe déjà une certaine capacité de prévision, sera fondamentalement subordonnée à la participation active des spécialistes du climat et des applications, ainsi qu’à un développement conjoint avec les parties intéressées. Les principaux domaines d’intérêt seront l’évaluation des expériences passées et présentes et la démonstration des applications, en mettant l’accent sur la communication et l’évaluation, y compris la mise à profit des activités d’application en cours dans les centres opérationnels.


Les priorités de la recherche

Le Projet de prévision infrasaisonnière à saisonnière accordera un haut degré de priorité aux objectifs ci après:
 

  • Comprendre les mécanismes de la prévisibilité infrasaisonnière à saisonnière;
     
  • Évaluer la qualité des prévisions infrasaisonnières, y compris les possibilités d’amélioration des prévisions, en s’attachant particulièrement aux phénomènes météorologiques à fort impact;
     
  • Comprendre la physique des modèles et apprécier la justesse avec laquelle sont représentés les processus d’interaction importants dans le système terrestre;
     
  • Comparer, vérifier et tester les combinaisons multimodèles à partir de ces prévisions et mesurer l’incertitude qui leur est attachée;
     
  • Comprendre les erreurs et biais systématiques dans la gamme des prévisions infrasaisonnières à saisonnières;
     
  • Définir et évaluer des méthodes d’intégration des prévisions infrasaisonnières à saisonnières dans les applications.

La prévision du temps au jour le jour est essentiellement un problème de conditions atmosphériques initiales, même si les conditions océaniques et terrestres peuvent entrer en ligne de compte. Au contraire, la prévision saisonnière à interannuelle repose fortement sur les composantes du système terrestre qui évoluent lentement, en particulier la température de la mer en surface. Entre ces deux échelles se situe la variabilité infrasaisonnière, qui désigne ici l’intervalle compris entre deux semaines et deux mois. La prévision infrasaisonnière à saisonnière n’est pas à un stade de développement très avancé. Il faut encore résoudre de nombreuses questions et améliorer les procédures avant de pouvoir bénéficier pleinement de ses capacités. Des indices d’une prévisibilité possible apparaissent bien au-delà de la plage normalement associée à la prévision numérique du temps (une dizaine de jours), mais la gamme des processus en jeu reste imprécise (Hoskins 2012a,b). Différents processus présents dans l’atmosphère, l’océan et les terres émergées constituent les sources de la  infrasaisonnière à saisonnière. En voici quelques exemples:

  • Oscillation de Madden-Julian: En tant que mode dominant de la variabilité intrasaisonnière dans les tropiques qui module la convection organisée, elle a un impact considérable dans les régions tropicales, mais aussi aux latitudes moyennes et hautes; elle est considérée comme une grande source de prévisibilité globale à l’échelle infrasaisonnière (Waliser 2011, par exemple);
     
  • Humidité du sol: La mémoire inertielle de l’humidité du sol peut s’étendre sur plusieurs semaines, ce qui aurait un effet sur l’atmosphère, par le biais de changements dans le bilan d’évaporation et d’énergie en surface, et influerait sur la prévision aux échelles intrasaisonnières de la température de l’air et des précipitations, dans certaines zones et à certaines périodes de l’année (Koster et al. 2010, par exemple);
     
  • Enneigement: Les propriétés radiatives et thermiques de vastes anomalies dans la couverture de neige ont le pouvoir de moduler la variabilité du climat, localement et à distance, aux échelles mensuelles à saisonnières (Sobolowski et al. 2010, par exemple);
     
  • Interaction stratosphère-troposphère: Les signaux de changements dans le tourbillon circumpolaire et dans le mode annulaire boréal/oscillation arctique proviennent souvent de la stratosphère, la circulation troposphérique anormale durant jusqu’à deux mois environ (Baldwin et al. 2003);
     
  • Conditions océaniques: Les anomalies dans la structure thermique des couches supérieures de l’océan, notamment la température de la mer en surface, provoquent des changements dans la convection et les flux de chaleur air-mer qui ont un impact sur la circulation atmosphérique. La possibilité de prévoir la variabilité intrasaisonnière sous les tropiques est plus grande avec un modèle couplé (Woolnough et al. 2007, par exemple), tandis que les modes couplés d’interaction océan-atmosphère, surtout le phénomène El Niño/ Oscillation australe, peuvent donner d’excellents outils de prévision, même au cours du premier mois.

Outre ces éléments, les questions visant les téléconnexions, la variabilité des moussons, les tempêtes tropicales, la prévision polaire et les glaces de mer revêtent un grand intérêt pour l’échelle infrasaisonnière à saisonnière; les liens avec les groupes de recherche qui étudient ces questions seront resserrés par le projet. Il est probable que la capacité de prévision sera meilleure dans certaines «conjonctures propices», par exemple lorsque de forts signaux émanant de plusieurs de ces processus interagissent de façon constructive, mais on ne comprend toujours pas parfaitement comment cela se produit, quelles sont ces conjonctures ni comment les reconnaître.

Les sujets essentiels touchant le climat comprennent l’apparition de phénomènes extrêmes (des vagues de chaleur aux ouragans), l’incidence de la variabilité saisonnière à interannuelle sur la probabilité attachée à ceux ci et la possibilité de prévoir utilement de telles variations climatiques. Bon nombre de phénomènes extrêmes qui ont les plus forts impacts présentent un net caractère infrasaisonnier/météorologique, ce qui accroît l’importance des échelles infrasaisonnières pour mieux comprendre et prévoir les phénomènes extrêmes dans un climat qui varie et évolue. Déterminer comment les variations infrasaisonnières à saisonnières sont susceptibles de modifier la fréquence, l’intensité et le lieu d’apparition d’événements à fort impact sera l’une des grandes priorités de la recherche conduite dans l’optique de la prise de décisions d’ordre sociétal.

La nature probabiliste du temps et du climat, des phénomènes extrêmes en particulier, exige de mettre au point et d’utiliser des outils de modélisation d’ensemble pour affiner les estimations de la probabilité d’événements à fort impact. De manière générale, un système de prévision d’ensemble qui repose sur plusieurs modèles plutôt que sur un seul, couramment appelé système de prévision d’ensemble multimodèle, procure des fonctions de densité des probabilités plus utiles qu’un système de prévision d’ensemble simple, en prenant des modèles d’efficacité comparable (Hagendorn 2010, par exemple). La plupart des systèmes de prévision infrasaisonnière à saisonnière actuellement en exploitation reposent sur des ensembles d’intégrations couplées océan-atmosphère, parce qu’une représentation réaliste du couplage océan-atmosphère est sans doute importante à ces échelles temporelles. Plusieurs grandes questions de modélisation subsistent néanmoins:

  • Quelle est la façon optimale d’initialiser un système couplé océan-atmosphère pour établir de bonnes prévisions infrasaisonnières à saisonnières?
     
  • Quelle est la meilleure configuration d’un système de prévision pour représenter l’incertitude et établir de bonnes prévisions infrasaisonnières à saisonnières?
     
  • Quel est l’effet d’une augmentation de la résolution horizontale ou verticale dans l’atmosphère et l’océan?
     
  • Quelles sont les principales sources d’erreurs systématiques à cette échelle temporelle?
     
  • Quel est l’impact du couplage de l’atmosphère avec un modèle de l’océan, de la surface des terres et de la cryosphère?
     
  • Quelle est la relation entre la dispersion et la qualité à cette échelle temporelle?
     
  • Quel avantage présentent les combinaisons multimodèles?

La vérification des prévisions sera cruciale et remplira un grand nombre de fonctions: i) obtention d’informations et d’indications sur les points forts et faibles des modifications apportées aux systèmes de prévision infrasaisonnière, que l’on peut mettre à profit pour améliorer les systèmes; ii) évaluation de l’incidence des composantes des systèmes de prévision infrasaisonnière, par exemple les effets systèmes d’assimilation des données terrestres, la capacité de prévoir l’oscillation de Madden-Julian et d’autres phénomènes infrasaisonniers (blocage, variation de la trajectoire des tempêtes, etc.) et la dépendance avec le phénomène El Niño–Oscillation australe; iii) appréciation des avantages que présentent les configurations d’ensemble multimodèles; iv) établissement de liens avec les utilisateurs et les applications des prévisions (par exemple, fournir de bonnes estimations de la qualité pour la prise de décisions).

Inondations en Australie, 2011
Inondations en Australie, 2011


Les recherches se pencheront également sur quelques phénomènes extrêmes particuliers, afin de démontrer la valeur des prévisions infrasaisonnières pour la société. Les cas étudiés seront choisis en fonction de leur impact sociétal, mais ils devront aussi coïncider avec d’importants sujets de recherche: vague de chaleur en Russie en 2010, inondations au Pakistan en 2010 et en Australie en 2011 ou vague de froid sur l’Europe en 2012. Ces projets de démonstration permettront surtout de mieux cerner les causes de certains phénomènes extrêmes. Plusieurs prévisions infrasaisonnières à saisonnières récentes ont montré un potentiel intéressant relativement à ces événements extrêmes à fort impact. Ainsi, quelques systèmes de prévision saisonnière ont réussi à prévoir les fortes précipitations qui se sont abattues sur le nord ouest de l’Australie pendant l’été austral 2010-2011 (voir la figure 1). Certaines prévisions à échéance prolongée ont anticipé la vague de chaleur survenue aux États-Unis d’Amérique en juillet 2012 (voir la figure 2). Il est donc opportun de déterminer si les systèmes de prévision à échéance prolongée les plus perfectionnés sont en mesure d’anticiper les phénomènes extrêmes à fort impact. Cela aiderait les spécialistes du climat à attribuer des événements extrêmes au réchauffement de la planète ou à une variabilité naturelle inhabituelle. et resserrerait la concertation entre le monde de la météorologie et celui du climat.


La mise en oeuvre

Les systèmes de prévision d’ensemble multimodèles ci après ont été mis au point ces dernières années pour la prévision saisonnière et la prévision météorologique à moyenne échéance: le Grand ensemble interactif mondial relevant du programme THORPEX (TIGGE), pour les échéances allant jusqu’à deux semaines, le Centre principal de l’OMM pour les prévisions à longue échéance et le Projet de prévision historique du système climatique (CHFP), pour les échéances saisonnières. Ces bases de données ne visent cependant pas à étudier la prévision infrasaisonnière. En conséquence, l’un des grands objectifs du Projet est de créer une base de données sur les systèmes de prévision d’ensemble multimodèles à partir des prévisions infrasaisonnières actuelles produites en exploitation (la plupart des centres mondiaux de production établissent maintenant des prévisions infrasaisonnières à saisonnières opérationnelles). La base de données renferma des ensembles de prévisions infrasaisonnières (jusqu’à 60 jours) et observera les protocoles du TIGGE afin de profiter de l’infrastructure en place.

Cette base de données constituera une riche source d’information commune pour étudier les mécanismes de la prévisibilité infrasaisonnière à saisonnière, évaluer leur qualité et apprécier l’utilité concrète des prévisions infrasaisonnières de pointe. L’application des prévisions saisonnières et le projet TIGGE ont tous deux montré que l’étalonnage des prévisions d’ensemble, pour corriger les biais des modèles dans la moyenne et la dispersion de l’ensemble et permettre une réduction d’échelle, pouvait compléter utilement la constitution d’ensembles multimodèles en améliorant la fiabilité probabiliste et la qualité des prévisions. Le projet TIGGE a établi qu’une prévision étalonnée provenant d’un simple modèle pouvait être aussi bonne qu’un ensemble de modèles non étalonnés, tandis que la construction d’un ensemble multimodèle de prévisions étalonnées améliorait la qualité globale des prévisions saisonnières (Robertson et al. 2004, par exemple). Dans la prévision numérique du temps, l’erreur des modèles n’est généralement pas grande au point de nécessiter un jeu de reprévisions; en revanche, elle est trop importante pour être ignorée aux échelles infrasaisonnières à saisonnières. On a donc besoin d’un jeu de reprévisions complet portant sur un nombre appréciable d’années pour calculer le biais du modèle, ce qui peut aussi servir à évaluer la qualité dans certains cas.


Un aspect majeur du projet sera de promouvoir l’emploi de ces prévisions et des estimations de leur incertitude dans les applications. Les travaux de chercheurs interdisciplinaires, engagés dans l’élaboration de stratégies et d’outils de gestion des risques pour l’établissement des services climatologiques, permet tront d’acquérir un savoir scientifique que pourra exploiter concrètement une large palette de décideurs. Des jeux étendus de reprévisions multimodèles serviront également à construire des modèles statistiques afin d’adapter les prévisions climatiques aux applications de divers secteurs. Le fait que les reprévisions soient parfois produites rapidement et ne portent que sur un faible nombre d’années pourrait toutefois poser problème dans certaines applications.

Il serait bon que les prévisions soient diffusées de manière aussi proche que possible du temps réel, afin de répondre aux besoins d’un nombre maximal d’applications et d’utilisateurs de la base de données. C’est néanmoins contraire à la politique de plusieurs centres opérationnels en matière de données. On suggère donc de commencer par une date de diffusion qui soit décalée de quelques semaines par rapport au temps réel. Il pourrait être possible, dans quelques projets de démonstration, d’offrir un accès en temps quasi réel pour une période limitée aux chercheurs et spécialistes des applications, et d’inclure éventuellement l’archivage d’un jeu de variables plus étendu et une résolution plus fine.

L’accès libre aux données de prévision et l’existence de bases de données conviviales sont nécessaires à une large adhésion. La base de données appuiera des recherches qui détermineront sans doute la portée des travaux d’élaboration des produits opérationnels que fourniront les centres de production mondiaux de l’OMM, sous la coordination de la Commission des systèmes de base. Les projets de démonstration seront du plus haut intérêt pour promouvoir la prévision infrasaisonnière auprès des utilisateurs des applications, favoriser les relations avec les partenaires et fixer des objectifs communs et ciblés. Le plan de mise en oeuvre donne des précisions sur la base de données que l’on se propose de créer.


Les liens

L’échelle infrasaisonnière à saisonnière entre dans le champ d’application du Cadre mondial pour les services climatologiques et le Projet entend contribuer de manière décisive à la première phase de cette initiative (court terme). Une collaboration et des liens seront tissés avec d’autres groupes de travail de l’OMM.

Figure 2 – Anomalies de température à 3 mètres, en moyenne sur la période allant du 2 au 8 juillet 2012 et par rapport au climat des 18 dernières
Figure 2 – Anomalies de température à 3 mètres, en moyenne sur la période allant du 2 au 8 juillet 2012 et par rapport au climat des 18 dernières années. Le graphique situé en haut à gauche montre l’analyse effectuée par le Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme. Les autres graphiques illustrent les prévisions d’anomalies de la température à 2 mètres pour le système de prévision d’ensemble du CEPMMT débutant le 28 juin (en haut à droite), le 21 juin (en bas à gauche) et le 14 juin 2012 (en bas à droite) et portant sur la même semaine que l’analyse du graphique supérieur gauche. Les plages temporelles des prévisions sont donc respectivement de 5 à 11 jours, 12 à 18 jours et 19 à 25 jours.

Par son interface avec la gestion des risques de catastrophes, la sécurité alimentaire et les marchés, l’échéance infrasaisonnière intéresse les organismes de développement, tels la Banque mondiale, USAID et le Ministère britannique du développement international, ainsi que diverses initiatives dans le domaine de la sécurité alimentaire, par exemple le Programme alimentaire mondial et le Programme sur les changements climatiques, l’agriculture et la sécurité alimentaire du Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale. L’affinement des prévisions de phénomènes extrêmes à cette échelle temporelle pourrait atténuer les effets des catastrophes et, ce faisant, accroître la résilience des populations vulnérables face aux perturbations climatiques et leur permettre de mieux s’adapter à l’évolution du climat. Surtout, la circulation bidirectionnelle de l’information entre les organismes axés sur le développement/la sécurité alimentaire et la communauté climatologique sera indispensable pour créer des services de valeur au sein du Cadre mondial pour les services climatologiques.


Utilité pour la société

La prévision infrasaisonnière n’a pas bénéficié du même intérêt que la prévision météorologique ou la prévision saisonnière parce que cette échelle temporelle apparaissait comme plus problématique, moins bien définie. Pourtant, on a des raisons de penser qu’il est possible de produire des prévisions infrasaisonnières qui seraient très utiles à la société.

Pour y parvenir, il faudra approfondir considérablement la compréhension scientifique des sources de prévisibilité et, parallèlement, perfectionner les modèles couplés atmosphère-océan-glace à haute résolution, améliorer les stratégies d’initialisation du système couplé et représenter plus justement les phénomènes atmosphériques de longue durée, telle l’oscillation de Madden-Julian. Plusieurs centres météorologiques opérationnels produisent déjà des prévisions infrasaisonnières, ou envisagent de le faire, et certains modèles climatiques pourraient aussi s’intéresser à cette échelle; cela ouvrirait la voie à la comparaison des prévisions issues des modèles, à la connaissance des processus qui sont robustes et de ceux qui ne le sont pas, et à la formulation de stratégies visant la combinaison des différentes prévisions de modèles.

Les prévisions multimodèles pourraient en faire partie, mais d’autres approches sont possibles. Une analyse et une évaluation aussi rigoureuses des prévisions élargiront la confiance des utilisateurs quand vient le temps de prendre des décisions dans les domaines de l’agriculture, de la production alimentaire, de la gestion des ressources en eau, de l’énergie, des transports, etc. Par ailleurs, la mise en place d’un mécanisme efficace qui permette aux utilisateurs de transmettre leurs avis sur l’utilité et l’intérêt de l’information résultante garantira une place privilégiée à l’affinement des prévisions au profit de ceux ci.


Bibliographie

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Brunet, G., M. Shapiro, D. Hoskins, M. Moncrieff, R. Dole, G.N. Kiladis, B. Kirtman, A. Lorenc, B. Mills, R. Morss, S. Polavarapu, D. Rogers, J. Schaake et J. Shukla, 2010, «Collaboration of the weather and climate communities to advance subseasonal to seasonal prediction», Bulletin of the American Meteorological Society, 1397-1406.

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Koster, R.D. et al., 2010, «Contribution of land surface initialization to subseasonal forecast skill: First results from a multi-model experiment», Geophysical Research Letters, 37, L02402, 10.1029/2009GL041677.

Robertson, A.W., U. Lall, S.E. Zebiak et L. Goddard, 2004, «Optimal Combination of Multiple Atmospheric GCM Ensembles for Seasonal Prediction», Mon. Wea. Rev., 132, 2732-2744.

Sobolowski, Stefan, Gavin Gong et Mingfang Ting, 2010, «Modeled Climate State and Dynamic Responses to Anomalous North American Snow Cover», J. Climate, 23, 785–799.

Waliser, D.E., 2011, Predictability and Forecasting. Intraseasonal Variability of the Atmosphere-Ocean Climate System, sous la direction de W.K.M. Lau et D.E. Waliser, Springer, Heidelberg, Allemagne, 2e édition, ISBN 978-3-642-13913-0, DOI 10.1007/978-3-642-13914-7.

Woolnough, S.J., F. Vitart et M.A. Balmaseda, 2007, «The role of the ocean in the Madden-Julian Oscillation: Implications for the MJO prediction», Quart. J. Meteor. Soc., 133, 117-128.
 


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1 Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme, Royaume-Uni de Grande Bretagne et d’Irlande du Nord

2 Institut internatinal de recherche sur le climat et la société, Institut de la Terre de l’Université Columbia, États-Unis d’Amérique


3 Expérience concernant la recherche sur les systèmes d’observation et la prévisibilité (THORPEX)

4 http://www.wmo.int/pages/prog/arep/wwrp/new/documents/Implementation_plan_V6.4_nolinenos.pdf


 

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