Approche intégrée de la gestion des crues et des sécheresses dans le bassin de la Volta

23 mars 2020
  • Author(s):
  • Robert Dessouassi, Armand Houanye, Hwirin Kim, Giacomo Teruggi et Ramesh Tripathi
Volta Basin Floods
Ces vingt dernières années, quelque deux millions de personnes, sur tout le cours de la Volta, ont subi les conséquences des crues, surtout le 68 % de la population travaillant dans le secteur agricole.
Le bassin de la Volta a une surface de quelque 400 000 km2, avec une population d’environ 29 millions d’habitants. Il s’étend sur des régions semi-arides à subhumides appartenant à six pays: le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Mali et le Togo. Le bassin est extrêmement sensible aux phénomènes météorologiques et hydrologiques. Les problèmes socio-économiques que connaissait la région au départ sont aujourd’hui exacerbés par les changements considérables du climat des dernières décennies: une réduction des précipitations et une élévation de la température. Or, le changement climatique devrait se poursuivre: selon les scientifiques, les saisons sèches seront plus longues et plus sèches, tandis que les périodes de mousson se feront plus courtes et plus intenses. Si des mesures d’adaptation au changement climatique ne sont pas mises en oeuvre, la sécurité alimentaire sera menacée, les agriculteurs perdront leurs moyens de subsistance et davantage de personnes vivront dans les établissements informels des zones très exposées aux inondations des centres urbains. 
 
Les agences nationales des pays du bassin de la Volta (essentiellement des services hydrologiques et météorologiques nationaux – SMHN), sont pleinement conscientes de la nécessité de préparer la région aux impacts socio-économiques et environnementaux du changement climatique. Selon elles, il est devenu prioritaire de mettre en oeuvre des stratégies de gestion intégrée des ressources en eau et d’élaborer une cartographie des risques et des systèmes d’alerte rapide pour accroître la résilience de la région et assurer son développement durable. Elles ont également établi qu’il fallait intégrer les stratégies de réduction des risques de catastrophes dans les plans nationaux de développement et d’adaptation au climat, renforcer les synergies et les mécanismes de coordination à l’échelle régionale, nationale et locale afin d’encourager une gestion intégrée des crues et des sécheresses et la mise à disposition de données normalisées, notamment en temps réel, de même que définir des voies et procédures d’informations coordonnées en vue de la mise en oeuvre d’un système d’alerte précoce de bout en bout. Sur le terrain, les communautés à risque ont besoin d’une formation et de connaissances sur les systèmes d’alerte précoce et les stratégies de gestion des risques de catastrophes et doivent participer activement aux plans de préparation et d’urgence. 
 
L’OMM, en partenariat avec l’Autorité du bassin de la Volta et le Partenariat régional pour l’eau (GWP) de l’Afrique de l’Ouest et avec le soutien des agences nationales des six pays riverains, a élaboré et soumis au Fonds d’adaptation une proposition de projet régional d’adaptation au climat couvrant tous ces aspects. Le projet, dont le budget s’élève à 7,92 millions de dollars, a été approuvé par le Conseil du Fonds d’adaptation en vue de sa mise en oeuvre en octobre 2018. 

Le projet du bassin de la Volta, qui repose sur une approche intégrée, vise à renforcer les capacités des agences nationales compétentes et le potentiel de résilience et d’adaptation des populations pour faire face aux incidences des inondations et sécheresses entraînées par le changement climatique. Il se fonde sur le cadre défini pour la gestion intégrée des crues et pour la gestion intégrée de la sécheresse, qui est soutenu depuis 17 ans par le Programme associé de gestion des crues (APFM) et le Programme de gestion intégrée des sécheresses (IDMP).

Le projet Volta, d’une durée de quatre ans, a été lancé officiellement en juin 2019. Il vise essentiellement à aider les six pays à appliquer des mesures coordonnées et communes pour améliorer leurs plans actuels de gestion des crues et des sécheresses à l’échelle régionale, nationale ou locale. Pour le mener à bien, on s’appuiera sur les enseignements tirés des expériences acquises dans le passé, de même que dans le cadre de projets en cours visant à réduire les risques de catastrophes ou à s’adapter au changement climatique.

Objectifs et éléments du projet 

Le projet a trois objectifs distincts: 

  1. Renforcer les capacités et développer les cadres établis, à l’échelle locale, nationale ou régionale afin de garantir une prise de décision éclairée en matière de risques
  2. Concevoir des actions concrètes d’adaptation et de protection de l’environnement en utilisant une approche intégrée
  3. Renforcer les capacités des milieux politiques et comme institutionnels aux fins d’une gestion intégrée des crues et des sécheresses aux plans local, national et transfrontalier.
Ces travaux s’articuleront dans trois volets: prévention des risques, adaptation concrète et participation des parties prenantes, et gouvernance. 
 
Dans le cadre du premier volet, on recensera les zones de vulnérabilité, les capacités de gestion des crues et des sécheresses, le degré d’exposition et les risques actuels et futurs afin de cartographier les risques de crue et de sécheresse aux plans local, national et régional. Lors de sessions de renforcement des capacités, des scénarios climatiques seront élaborés et communiqués aux parties prenantes, avec les cartes de risques, afin d’examiner l’impact possible du changement climatique sur des zones définies. Les recommandations des parties prenantes seront alors intégrées dans les méthodes d’adaptation au changement climatique et les stratégies de gestion des risques de catastrophes. Les participants recevront aussi des indicateurs et des outils de sensibilisation à l’utilité des écosystèmes pour le bien-être humain et à l’importance de les protéger et de les restaurer. Grâce à ces outils, les parties prenantes pourront contribuer à la préservation des zones humides et d’autres zones d’importance transfrontalière telles que les zones à risque pour la biodiversité.
 
Le deuxième volet permettra d’élaborer une méthode intégrée de gestion des crues et des sécheresses dans la région, grâce aux systèmes de données et d’informations et aux systèmes d’alerte précoce qui seront mis en place dans le bassin. L’élaboration et la mise en oeuvre du Système intégré d’alerte précoce pour les crues et la sécheresse à l’échelle du bassin de la Volta sera le principal résultat du projet. La plate-forme en accès libre myDewetra.world4 sera utilisée pour connecter les diverses bases de données (relatives à la météorologie, à l’hydrologie, à la climatologie, aux risques) et d’autres résultats validés, tels que les systèmes de modélisation hydrologique, les produits d’aide à la décision et les alertes rapides, provenant de projets et d’initiatives connexes aux plans local, national et régional. Pour mieux rassembler les informations, le système d’alerte précoce couvrira toute la chaîne de valeur de la réduction des risques: la cartographie de la vulnérabilité et des risques, la prévision, la diffusion des alertes et l’aide à la décision. L’exploitation de la nouvelle plateforme intégrée d’alerte précoce sera étayée par une série d’essais pilotes effectuées dans divers sous-bassins et zones vulnérables ayant des conditions socio-environnementales différentes. Des activités de renforcement des capacités seront menées pour veiller à ce que les nouveaux produits, services et outils soient utilisés. En outre, des modules d’auto-assistance prévoyant des solutions fondées sur la nature et des méthodes participatives adaptées aux besoins propres aux femmes seront élaborés aux plans local et national. 

«Chacun des pays du bassin de la Volta doit disposer d’informations hydrométéorologiques pour prévenir et gérer les effets néfastes du changement climatique. Mais aussi, et surtout, pour prendre des mesures afin d’offrir de meilleures conditions de vie aux populations vivant dans le bassin de la Volta.» — Colonel Martial Mé, représentant le Ministre des eaux et forêts de Côte d’Ivoire à l’atelier de lancement du projet

Le volet 3 examinera les avantages retirés de la mise en oeuvre du projet afin de réviser ou de concevoir des politiques, plans et lignes directrices pour la réduction des risques de catastrophes et l’adaptation au changement climatique. Les mesures et stratégies d’adaptation compatibles avec les politiques environnementales et sociales, de même qu’avec les principes d’égalité des sexes seront examinées au plan local afin d’accroître la résilience aux crues et aux sécheresses. La participation et l’engagement des acteurs locaux faciliteront l’adoption des stratégies de réduction des risques de catastrophe et d’adaptation au changement climatique et assureront une durabilité à long terme.

Situation actuelle et résultats escomptés 

L’atelier de lancement, tenu à Abidjan (Côte d’Ivoire) les 25 et 26 juin 2019, a amorcé la mise en oeuvre du projet de gestion des crues et des sécheresses dans le bassin de la Volta. La première étape a été de déterminer les capacités et les besoins actuels à l’égard du système intégré d’alerte précoce pour les crues et les sécheresses. Des réunions de consultation nationale ont été organisées à cet effet dans les six pays avec les parties prenantes. MyDewetra.world – une plateforme pleinement intégrée proposant des informations et produits utiles pour la gestion des crues et des sécheresses – sera mise à la disposition des parties prenantes au terme de la première année, en juin 2020. 

Sites pilotes provisoires pour tester le système intégré d’alerte précoce
Figure 2: Sites pilotes provisoires pour tester le système intégré d’alerte précoce
Le projet permettra aux institutions nationales et régionales de développer leur capacité d’assurer la durabilité à long terme et d’améliorer leurs résultats. Il apportera une aide aux parties prenantes de tous niveaux en leur donnant des orientations en matière de politique et de gestion et en leur communiquant des données scientifiques, des informations et les meilleures pratiques en matière de systèmes intégrés de réduction des risques de catastrophes et d’adaptation au changement climatique. Les six pays riverains disposeront d’un cadre de référence pour la gestion transfrontalière à l’échelle du bassin afin de garantir un développement environnemental et économique durable. La région pourra appliquer des solutions concrètes pour prévenir toute augmentation de sa vulnérabilité due au changement climatique et pour mettre en place un réseau efficace d’acteurs à même d’examiner les mesures nécessaires pour l’adaptation au climat. 
 
Le vaste programme de formation du projet – portant sur des aspects aussi divers que la cartographie des dangers et des risques, la gestion des ressources en eau, les prévisions hydrologiques, la gestion locale des inondations, l’agrométéorologie et la gestion intégrée de la sécheresse – apportera un soutien technique et de nouveaux outils d’aide à la décision aux centres opérationnels nationaux. 
 
Les activités conjointes des organisations partenaires, telles que la spécification des exigences, l’installation des équipements dans les SMHN, la communication d’informations au public et le travail de terrain sur les sites d’essai pilotes, permettra aussi d’intensifier les échanges, de créer des groupes d’utilisateurs et de former des formateurs, qui reprendront le projet à l’avenir et prolongeront sa portée.

Durabilité 

La durabilité à long terme des réalisations du projet dépendra des données et produits météorologiques, hydrologiques et climatologiques que fourniront les SMHN des pays riverains. Plusieurs d’entre eux, tout comme d’autres agences de protection de l’environnement, ont déjà fourni des lettres de soutien pour veiller au transfert à long terme des informations des bases de données nationales afin que la prochaine unité de coordination du Système d’alerte précoce transfrontalier puisse continuer de fonctionner. 

Les organisations internationales et les institutions financières seront invitées à prendre connaissance des améliorations réalisées dans le cadre du projet et à définir les autres besoins à l’échelle locale, nationale et régionale. Il devrait ainsi être possible de trouver de nouvelles sources de financement et de créer des synergies dans le cadre d’autres projets en cours ou à vernir dans les six pays. 

Project Donors and Partners

Adaptation Fund Logo   APFM IDMP Logo    APFM IDMP Logo      GWP WA Logo    VBA Logo

Auteurs

Robert Dessouassi, Autorité du bassin de la Volta 

Armand Houanye, Partenariat régional pour l’eau de l’Afrique de l’Ouest (GWP-WA)

Hwirin Kim, Secrétariat de l’OMM 

Giacomo Teruggi, Secrétariat de l’OMM 

Ramesh Tripathi, Secrétariat de l’OMM 

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