Depuis sa création, l’OMM joue un rôle de premier plan dans la facilitation de l’échange et de l’exploitation des données à l’échelle mondiale. L’échange de données qui est au cœur de la Convention de l’OMM définit la mission et l’objectif fondamentaux de l’Organisation. L’échange libre et gratuit de données d’observation météorologiques remonte à 1873, avec la création de l’Organisation météorologique internationale, prédécesseur de l’OMM (voir l’article 1). Mais dans le monde en rapide évolution d’aujourd’hui, l’OMM risque de perdre sa longueur d’avance en matière d’échange de données et il est urgent de modifier son approche afin de s’assurer que ses Membres ne soient pas laissés pour compte.
Au cours des dernières décennies, le reste du monde a pris conscience de la valeur des données, suscitant une vague d’enthousiasme dans tous les secteurs d’activité œuvrant pour la collecte, l’analyse et, souvent, la monétisation des données. Parallèlement, l’OMM a continué de travailler avec ses Membres pour faciliter et accroître la quantité de données mises à disposition de la communauté internationale – mais sans parvenir à atteindre, reconnaissons-le, le même rythme que le reste du monde.
Des problèmes liés aux données ont par ailleurs vu le jour parmi les Membres. Certains SMHN – confrontés à des difficultés financières ou s’avisant de la valeur des données météorologiques et climatiques – se sont ralliés à l’idée de monétiser leurs données et leurs résultats, en vendant des produits dérivés et, dans certains cas, les observations réalisées elles-mêmes. Cette monétisation peut être une source de tensions entre les Membres d’une Organisation qui repose sur le principe d’un échange de données libre et sans restriction. Selon les auteurs, la valeur réelle des données des Membres tient à leur valeur économique en aval qui résulte des produits d’analyse et de prévision, ainsi qu’aux services axés sur les impacts et visant à venir en aide aux décideurs. Du point de vue des pouvoirs publics, la mise à disposition des données accroît la valeur sociétale et économique générée en aval. Un bon exemple en est offert par l’ouverture des archives Landsat à laquelle a procédé le Gouvernement des États-Unis d’Amérique et qui, en 2011, a généré un bénéfice économique estimé à 1,7 milliard de dollars É.-U. pour les seuls utilisateurs américains1.
Aujourd’hui, l’importance accordée aux données à l’échelle mondiale offre un certain nombre de possibilités à l’OMM et à ses Membres. Le paysage des données s’est ouvert grâce à l’évolution rapide des technologies, et les avantages sociétaux et économiques des dispositions relatives aux données ouvertes ont été reconnus. Le présent article examine cette évolution sous l’angle des relations de l’OMM avec les acteurs technologiques mondiaux et quant à ses conséquences potentielles pour les Membres de l’OMM. Il traite également de la nouvelle politique unifiée de l’OMM en matière de données dans le contexte du programme mondial dans ce domaine et de la Stratégie du Secrétaire général de l’ONU pour l’exploitation des données.
Politique de l’OMM en matière de données et Stratégie du Secrétaire général de l’ONU pour l’exploitation des données
En tant qu’institution spécialisée, l’OMM fait partie du système des Nations Unies, qui s’occupe également du programme mondial en matière de données. Le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies (ONU) ouvre la voie au plus haut niveau à l’établissement d’un cadre stratégique pour une meilleure exploitation des données, en adoptant des approches pleinement ancrées dans les valeurs de l’ONU telles que les droits de l’homme. La Stratégie 2020-2022 du Secrétaire général de l’ONU en matière de données2 est une «stratégie pour une action de tous, en tout lieu dans le système des Nations Unies – avec discernement, force et intégrité». Ce programme vise à une transformation axée sur les données, reposant sur le renforcement des capacités dont l’ONU a besoin pour réussir au XXIe siècle dans les domaines des données, du numérique, de la technologie et de l’innovation. Les données imprègnent tous les aspects des activités menées au sein du système des Nations Unies. Le pouvoir des données, exploité de manière responsable, est essentiel aux programmes mondiaux au service desquels il est mis. La Stratégie de l’ONU pour l’exploitation des données entend tirer parti de l’empreinte, de l’expertise et de la connectivité du système des Nations Unies pour créer de précieuses occasions de faire progresser à l’échelon mondial «l’action en matière de données» avec discernement, force et intégrité.
Partant d’une vision de l’Organisation axée sur les données, la Stratégie s’appuie sur trois piliers essentiels:
- L’établissement de bases stratégiques – En créant un écosystème de données à l’échelle de l’ensemble du système des Nations Unies et propre à maximiser la valeur de ces données, l’ONU s’efforce de libérer tout son potentiel. Elle cherche à prendre de meilleures décisions et à apporter un soutien renforcé aux peuples et à la planète – aux moments qui importent le plus.
- La création de valeur à partir des données et la place centrale accordée aux priorités – Ce pilier repose sur la fourniture de cas d’utilisation qui témoignent de la valeur ajoutée offerte aux parties prenantes conformément aux priorités de l’ONU, à savoir notamment les objectifs de développement durable (ODD), l’action climatique et l’égalité entre les femmes et les hommes – autant d’aspects qui concernent l’OMM.
- La promotion des éléments catalyseurs, le développement des capacités et sa poursuite itérative – L’apprentissage par la pratique est ici adopté pour promouvoir les éléments catalyseurs les plus importants (peuples et culture, gouvernance des données et contrôle de la stratégie, partenariats, environnements technologiques) et pour développer de nouvelles capacités d’une manière souple et itérative. L’accent sera mis en particulier sur l’analyse (que s’est-il passé, pourquoi cela est-il arrivé, qu’est-ce qui pourrait se produire ensuite et quelles sont les réponses à apporter) et la gestion des données (pour faire en sorte que tout le monde puisse découvrir, obtenir, intégrer et partager les données nous permettant de nous acquitter de nos responsabilités envers l’Organisation, les peuples et la planète).
La Stratégie reconnaît la nécessité d’établir des partenariats en vue de renforcer les liens avec les écosystèmes de données mondiaux. Il existe une forte synergie avec la politique de l’OMM en faveur d’un échange de données libre et sans restriction.
La Stratégie de l’ONU pour l’exploitation des données reconnaît qu’en ce domaine la route est encore longue pour l’Organisation et qu’un certain temps sera nécessaire avant que ses capacités en matière de données soient véritablement transformées dans l’ensemble du système des Nations Unies. Ayant déjà jeté les bases d’un partage ouvert de données, l’OMM suit la même voie, mais à un stade différent. Toutefois, elle se voit confrontée en partie aux mêmes défis. Pour l’OMM, une collaboration et un partenariat accrus en matière de données offrent à l’Organisation et à ses Membres la possibilité de jouer un rôle plus important dans la résolution des problèmes mondiaux et de fournir des services plus efficaces au niveau national.
Le Plan stratégique de l’OMM 2020-2023 est axé sur une approche intégrée et globale des systèmes terrestres, centrée autour des données. Cet objectif fondamental est appuyé par les capacités avancées et évolutives du Système mondial intégré des systèmes d’observation de l’OMM (WIGOS), de la version 2.0 du Système d’information de l’OMM (SIO) et du Système mondial de traitement des données et de prévision (SMTDP) sans discontinuité. L’OMM a également pris conscience de la nécessité d’élargir ses possibilités de collaboration et de partenariat.
Au sein du système des Nations Unies, l’OMM entretient de solides relations de collaboration avec de nombreuses organisations, institutions spécialisées et programmes. La Commission océanographique intergouvernementale (COI) de l’UNESCO joue un rôle essentiel à titre de collaborateur et de partenaire, en alignant ses politiques en matière de données sur celles de l’OMM. Par ailleurs, l’OMM collabore étroitement avec l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) dans le domaine de la recherche et des services, et la politique unifiée de l’OMM en matière de données pourrait permettre de développer encore l’échange de données entre les deux organisations à mesure que de nouveaux besoins en matière de services seront identifiés et classés par ordre de priorité.
L’OMM travaille avec ses partenaires à l’intégration des données météorologiques, climatologiques, hydrologiques et environnementales avec les données démographiques, sanitaires et autres des institutions partenaires des Nations Unies. Cela permettra de mieux orienter les décideurs et de répondre aux priorités stratégiques du programme plus large pour l’exploitation des données au sein du système des Nations Unies.
La décision d’élargir, de recadrer et de réaffirmer sa politique en matière de données au moyen de la politique unifiée en matière de données est motivée par la volonté de fournir ce dont l’OMM a besoin pour relever les défis mondiaux et remplir les mandats de ses Membres. Ces objectifs sont conformes aux ambitions de la Stratégie du Secrétaire général de l’ONU pour l’exploitation des données.
La politique unifiée en matière de données traduit le fait que l’échange international de données au sein de l’OMM et avec ses partenaires apporte un appui à de multiples programmes mondiaux. Les données et services météorologiques, climatiques, hydrologiques et environnementaux connexes sont essentiels à la mise en œuvre des ODD, de l’Accord de Paris conclu au titre de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et de la Déclaration et Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (2015-2030).
La politique de l’OMM en matière de données et le programme mondial en matière de données
On dit souvent que nous vivons dans un monde régi par les données. Des algorithmes élaborés à partir de données alimentent notre cycle d’informations quotidiennes, nous suggèrent des films à regarder, organisent nos médias sociaux et sélectionnent les annonces publicitaires que nous voyons. Si, depuis toujours, l’OMM a été un chef de file en matière d’échange libre et ouvert de données, il est juste de dire que le débat mondial sur les données a progressé rapidement, créant par là même de nouvelles technologies, de nouvelles terminologies et de nouveaux outils, qui ont pris le pas sur l’OMM. Si l’OMM continue de travailler avec ses Membres en vue de faciliter et d’accroître la quantité de données mises à la disposition de la communauté internationale, elle n’est plus en avance sur son temps ou n’avance plus au même rythme que le reste du monde.
D’autre part, le mécanisme de l’OMM doit être stable et f iable pour trois raisons. Premièrement, il est essentiel de gérer et de suivre de près les répercussions de toute évolution des techniques et des pratiques d’observation afin de surveiller les tendances à long terme du climat. À cette fin, on observe une tendance au conservatisme qui a influencé de nombreux aspects de l’acquisition, de la gestion et du partage des données. Deuxièmement, les règlements techniques et les résolutions de l’OMM sont élaborés et mis en œuvre par consensus et l’OMM peut être limitée dans une certaine mesure par les capacités et l’aptitude au changement de ses Membres. Troisièmement, pour pouvoir prendre des décisions rapides et efficaces permettant de sauver des vies, par exemple en émettant des alertes ciblées pour inviter la population à se préparer à des phénomènes météorologiques violents qui la menacent, il est essentiel de disposer de données fiables pour étayer les modèles et les services.
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Figure 3 - Station météo de Krosno, un professeur et un étudiant préparent un ballon-sonde météo pour lancement, Taranis – Bull Sequana XH2000, Météo France (Ranked 49 in the Supercomputer Top 500, June, 2021) |
Le paysage mondial des données et les géants de la technologie
La politique en matière de données et l’échange de données entre les Membres sont rendus possibles par la technologie, et l’essor des données en tant que marchandise a engendré, de manière synergique, d’énormes progrès, de l’informatique en nuage à l’intelligence artificielle. Les systèmes de traitement des données sont standardisés au point que ces capacités sont à la disposition de presque toute personne dotée d’une connexion Internet. Cette innovation technologique a entraîné une perturbation des marchés traditionnels, l’émergence de nouvelles opportunités commerciales et la création de beaucoup d’entreprises nouvelles, grandes et petites. Parmi celles-ci, des leaders du marché dominent le secteur et constituent l’essentiel du segment «en tant que service».
Amazon est le leader du marché des solutions basées sur l’informatique en nuage, suivi de Microsoft, puis d’Alibaba et de Google (Alphabet) (voir le tableau 1). Apple et Facebook dominent leurs propres segments, mais ne sont pas actuellement des acteurs importants des services informatiques en nuage. IBM détient également une forte position sur le marché, mais plutôt en tant que fournisseur de matériel et de services tels que ceux fournis par la Weather Company, sa filiale.
Tableau 1. Part de marché de l’infrastructure en tant que service (IaaS) à l’échelle mondiale, 2019‑2020 (en millions de dollars É.‑U.)
Entreprise
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2020
Recette
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2020
Part du marché (en %)
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2019
Recette
|
2019
Part du marché (en %)
|
2019–2020
Croissance (en %)
|
Amazon
|
26 201
|
40.8
|
20 365
|
44.6
|
28.7
|
Microsoft
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12 658
|
19.7
|
7 950
|
17.4
|
59.2
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Alibaba
|
6 117
|
9.5
|
4 004
|
8.8
|
52.8
|
Google
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3 932
|
6.1
|
2 367
|
5.2
|
66.1
|
Huawei
|
2 672
|
4.2
|
882
|
1.9
|
202.8
|
Les autres
|
12 706
|
19.8
|
10 115
|
22.1
|
25.6
|
Total
|
64 286
|
100.0
|
45 684
|
100.0
|
40.7
|
Les médias sociaux et les moteurs de recherche sur Internet jouent un rôle important dans le domaine de la fourniture et de la diffusion d’informations météorologiques. Selon les données les plus récentes, il y avait 4,48 milliards d’utilisateurs de médias sociaux dans le monde en juillet 2021, soit environ 57 % de la population totale. Près de 93 % de l’ensemble du nombre de visites sur les sites transitent par les moteurs de recherche et plus de quatre internautes sur cinq accèdent aux informations au moyen des médias sociaux.
Cette tendance ne fait que s’accentuer. En 2020, Facebook a constitué une source régulière d’informations pour environ un tiers des Américains. Selon une étude, près de 65 % des recherches sur Google se sont terminées sans un clic vers un autre site Web – contre 50 % en juin 2019. L’énoncé de vision de Google est de «fournir un accès aux informations du monde entier en un clic», et il est fréquent que les résultats proposés soient basés sur une recherche prédictive, c’est-à-dire qu’ils fournissent des informations avant que l’utilisateur ne lance une requête de recherche. Par exemple, si l’on clique sur «météo» après avoir tapé «m», Google fournit en tête des résultats une grande quantité de données météorologiques relatives à la localisation de l’utilisateur: conditions actuelles (température, précipitations et vent). De nombreux utilisateurs trouvent sans aucun doute ce dont ils ont besoin sans avoir à cliquer sur la source des données – weather.com – ou le site Web du SMHN local, qui peut se trouver plus bas dans la liste des résultats.
Selon un rapport d’International Data Corporation (IDC), un changement stratégique important est intervenu parmi les principaux fournisseurs d’infrastructure en tant que service (IaaS) en nuage public qui continuent d’évoluer vers le développement d’un ensemble d’options de déploiement de nuages dédiés et hybrides pour répondre à la demande des entreprises en matière de haute performance et de cas d’utilisation et de périphérie distribuée. Le marché de l’IaaS en nuage public a connu une croissance considérable au cours de l’année 2020, avec une croissance de 34 % atteignant 65,5 milliards de dollars É.-U.
Avec des acteurs aussi importants qui dominent le marché et permettent de réaliser des économies d’échelle, il n’est pas rentable pour les SMHN, par exemple, d’essayer de «faire cavalier seul» dans le domaine de l’informatique en nuage. Même s’il existe des projets concernant une plate-forme European Weather Cloud soutenue par le CEPMMT, l’EUMETSAT et les SMHN de leurs États membres, une telle solution est hors de portée de la majorité des Membres de l’OMM. De même, pour la diffusion de l’information, il est impossible de rivaliser avec les principaux protagonistes en termes de présence et d’emprise sur le marché.
Le grand défi des données
La machine météorologique mondiale3 produit chaque jour d’énormes volumes de données. Chaque augmentation de la puissance de calcul va de pair avec une amélioration de la résolution spatiale et verticale des modèles, ce qui se traduit par une amélioration des performances et un accroissement massif du volume des données. Par exemple, le CEPMMT produit quotidiennement 120 téraoctets (To) de données météorologiques brutes et 30 To de produits définis par l’utilisateur, soit l’équivalent d’un disque dur portable de 144 To ou d’un pétaoctet (Po) par semaine4.
Pour ce qui est de la livraison aux utilisateurs, le volume moyen de transmission de données traité par le magasin de données de production du CEPMMT (ECPDS) est proche de 1 Po par mois. La diffusion des produits de prévision du CEPMMT concerne 547 sites dans 78 pays, et les données d’observation sont récupérées à partir de 557 sites dans 34 pays.
Le volume important de données est problématique. Il n’est pas pratique de transférer des ensembles de données entiers ici et là au moyen de connexions Internet. Pour de nombreux Membres de l’OMM, le problème est accentué par les limites de leurs propres systèmes de stockage et de traitement et, très souvent, par des connexions Internet lentes, voire peu fiables. Le renforcement de la capacité des systèmes informatiques et le souhait manifesté par de nombreux SMHN de disposer de produits d’une résolution plus élevée ne feront qu’aggraver davantage ce problème.
Le caractère mondial du temps et du secteur technologique pose un autre problème. Les développeurs de technologies – comme la téléphonie mobile et les montres intelligentes – voudront peut-être intégrer des informations météorologiques dans leurs produits. Un exemple simple serait une montre intelligente «active» qui assure le suivi de l’exercice pratiqué, fournit des informations météorologiques à son utilisateur et incorpore des informations météorologiques pour calculer le niveau d’effort de ce dernier ou d’autres données dérivées. En pareil cas, une interface météo distincte ne serait pas élaborée pour chaque pays ou territoire, mais le développeur chercherait une source de données cohérente au niveau mondial qui soit accessible en mode standard. Pour ce faire, le plus facile serait de proposer une interface de programmation d’applications (API) fournissant les données nécessaires pour répondre aux besoins de l’utilisateur au moyen d’une simple requête. Par exemple, l’interface API fournirait les conditions météorologiques actuelles ou les prévisions du temps pour un endroit donné.
Il n’existe aucune plate-forme mondiale fournissant des informations en temps réel et des prévisions provenant des différents SMHN. Les développeurs auraient également du mal, pratiquement, à rassembler des données émanant des différents sites Web des SMHN, dont le format et le mode de diffusion ne sont pas identiques. La solution la plus simple pour les développeurs est de se tourner vers une source d’information mondiale unique telle que The Weather Company. Les développeurs qui sont à la recherche d’informations plus détaillées peuvent s’approvisionner en données en puisant, par exemple, dans les produits librement disponibles de l’Administration américaine pour les océans et l’atmosphère (NOAA). Toutefois, cela se fera peut-être au détriment de la facilité d’utilisation, car les fichiers se présentent en l’occurrence dans des formats scientifiques et certains sont très volumineux.
Il s’agit là d’un problème pour les SMHN. En effet, s’ils détiennent souvent les produits et les données les plus précis au niveau local concernant leur territoire, leur taille est simplement trop réduite pour les développeurs d’applications, qui peuvent aussi se révéler trop petits pour traiter avec les SMHN pris isolément, notamment en cas de marchés mondiaux. Comment, dès lors, les différents SMHN peuvent-ils transmettre leurs informations aux utilisateurs sans créer leur propre application?
Une volonté de convergence
L’évolution du phénomène mondial des données et l’essor des géants de la technologie ouvrent des perspectives pour l’OMM et ses Membres. Trop grandes pour être négligées et dotées de capacités techniques dont les Membres de l’OMM peuvent bénéficier, les grandes entreprises peuvent faire partie de la solution.
Ce qui est devenu clair, c’est que l’OMM et ses Membres peuvent être des bénéficiaires directs des perspectives ainsi offertes. Par exemple, il serait possible de reconnaître le rôle important des géants de la technologie dans la fourniture de la technologie de base pour l’échange de données et dans la création de conditions favorables à la distribution efficace d’informations et de services pour une prise de décision éclairée.
Les perspectives sont peut-être encore plus attractives à l’échelle mondiale dans la poursuite de l’efficience et de l’efficacité, tout en s’appuyant sur la stabilité, la fiabilité et la confiance qui sont si importantes pour que soient respectés les engagements pris en matière de services par les Membres au niveau national. Par exemple, les SMHN pourraient être des consommateurs de services en nuage pour l’informatique et le stockage, même si une autre possibilité s’offre ici qui vise à créer des espaces de collaboration où les SMHN peuvent travailler ensemble sur de grands ensembles de données. Ce qui est clair, c’est qu’un engagement fort avec le secteur s’impose et, alors que les différents SMHN devront faire preuve de mobilisation, ces efforts ne seront renforcés et les avantages ne seront pleinement réalisés que par une coordination à l’échelon mondial.
De même, le rôle croissant que jouent les données dans la politique internationale est le signe que le moment est venu pour l’OMM de tirer parti d’une collaboration et d’un partenariat accrus au sein du système des Nations Unies. La Stratégie plus large de l’ONU pour l’exploitation des données cadre avec la politique de l’OMM en la matière, axée sur l’échange libre et sans restriction des données, et elle l’appuie. La disponibilité accrue de données auxiliaires – telles que les données sur les incidences des catastrophes, les informations sanitaires et d’autres données détenues par les organismes des Nations Unies – renforcera la capacité des Membres de l’OMM à fournir des services axés sur les impacts en combinant des données météorologiques, climatologiques, hydrologiques et environnementales avec ces ensembles de données. Parallèlement, l’OMM a un rôle important à jouer en fournissant des données à l’appui des grands programmes de l’ONU – qu’il s’agisse de la réduction des risques de catastrophe, des changements climatiques, de la gestion durable des océans ou de la santé publique mondiale.
Footnotes
[4] The Weather Machine: A journey inside the forecast, A Blum - 2019 - HarperCollins
[5] https://meetingorganizer.copernicus.org/EGU2020/EGU2020-15048.html
Par Michel Jean, Président de la Commission des observations, des infrastructures et des systèmes d’information (INFCOM) de l’OMM et Professeur associé émérite, Service météorologique du Canada, Environnement et Changement climatique Canada, Sue Barrell, Présidente du Groupe d’étude des questions et politiques relatives aux données de l’INFCOM et Anthony Rea, Secrétariat de l’OMM