Vingt années de partenariat au service de l’eau

01 novembre 2016

Une chose est sûre: le développement durable ne sera possible que si l’on tient compte du changement climatique. Une autre chose est sûre: l’humanité ne pourra s’adapter au changement climatique que si l’on tient compte des ressources en eau. En septembre 2015, lorsque 193 pays ont adopté aux Nations Unies le Programme de développement durable à l’horizon 2030, ces deux certitudes étaient si présentes dans les délibérations que l’objectif 6 est consacré à l’eau. Cet objectif ne se limite pas à l’impérieuse nécessité de garantir l’accès de tous à des services d’approvisionnement et d’assainissement. Il englobe la palette entière des questions de gestion, y compris l’action menée par le Partenariat mondial pour l’eau (GWP) en faveur d’une approche intégrée de l’utilisation de l’eau dans tous les secteurs économiques.

  • Author(s):
  • Steven Downey and Frederik Pischke

Le Partenariat a commencé il y a vingt ans, dès sa création en 1996, à aider les pouvoirs publics à gérer les ressources en eau de manière transsectorielle. Quand il est devenu une organisation intergouvernementale en 2002, l’OMM en a été membre fondateur, témoignant son adhésion à l’approche défendue par le GWP. Fort de 85 partenariats nationaux et d’au-delà de 3 000 partenaires institutionnels dans 182 pays, le GWP reste fidèle à sa conception première, que l’on appelle aujourd’hui la gestion intégrée des ressources en eau.

Passer à une approche transsectorielle de la gestion des ressources en eau

Les investissements dans le secteur de l’eau sont souvent répartis entre de nombreuses institutions et plusieurs paliers de gouvernement. Les décisions manquent d’unité et de cohérence, car elles émanent de ministères (agriculture, énergie, commerce, etc.) qui n’ont pas la protection des ressources en eau comme principal centre d’intérêt. Elles sont rarement viables, d’où la nécessité d’adopter une approche transsectorielle et intégrée dans ce domaine.

GWP, Lake Cyohoha
La population locale et les pouvoirs publics, dont le Ministre de l’eau et de l’environnement, ont planté des arbres pour préserver la zone tampon du lac Cyohoha. Le but était de sensibiliser la population afin qu’elle se charge elle-même des mesures de protection, tout en montrant l’importance d’une gestion intégrée des ressources en eau.

Par l’entremise de ses multiples membres, le Partenariat préconise et facilite la mise en place de plans de gestion intégrée et d’utilisation efficace des ressources en eau, pour donner suite aux engagements contractés par les États à l’occasion du Sommet mondial pour le développement durable organisé à Johannesburg en 2002. Le manuel intitulé Catalyser le changement et d’autres publications du GWP expliquent aux pays ce qu’ils doivent savoir et ce qu’ils doivent faire pour atteindre les objectifs fixés lors du Sommet.

Par ailleurs, le Partenariat a lancé un programme pour aider 13 pays du continent africain à définir et à mettre en œuvre des plans de gestion intégrée des ressources en eau. Le programme a pris fin en 2008. Il a montré que la gestion des ressources en eau devait faire partie des mesures prises en faveur de l’essor national pour contribuer utilement au développement durable et à l’élimination de la pauvreté. Un autre de ses nombreux enseignements, sur lequel reposera un programme ultérieur, est que le développement est menacé si l’on ne renforce pas la résilience face au climat en améliorant la gestion de l’eau.

L’initiative suivante du Partenariat, intitulée Eau, climat et développement, a réuni le Programme associé de gestion des crues, exécuté conjointement par l’OMM et le GWP, et le Programme de gestion intégrée des sécheresses. L’envergure et l’expertise des deux organisations ont facilité la mise en œuvre à l’échelon national et local. Les dix pays d’Europe centrale et d’Europe de l’Est qui ont affiné leur mode de gestion des sécheresses grâce à cette initiative en voient déjà tous les bienfaits. Les publications Guidelines for Preparation of the Drought Management Plans et Guidelines on Natural Small Water Retention Measures se sont avérées utiles dans ce cadre.

Le Partenariat fait la soudure entre les éléments que fournissent les producteurs d’information climatologique et les éléments dont ont besoin les décideurs, les planificateurs, les agriculteurs et d’autres utilisateurs pour gérer les ressources en eau. Ce faisant, il concourt au Cadre mondial pour les services climatologiques (CMSC). En Amérique centrale, par exemple, on a montré aux météorologistes comment utiliser l’indice de précipitations normalisé, valeur courante pour surveiller la sécheresse. En 2015, l’indice a été intégré dans les prévisions climatiques transmises aux ministères concernés. L’étape suivante est la mise sur pied d’un système d’alerte précoce qui renforcera la capacité de suivre les conditions de sécheresse dans la région et qui aidera les hauts responsables à prendre des décisions dans les domaines visés, en particulier l’agriculture, la pêche, la gestion des ressources en eau, la réduction des risques et la sécurité alimentaire.

Une autre initiative portait sur la résilience des populations locales à l’égard du climat. Au Burundi et au Rwanda, le Partenariat a exécuté avec les parties prenantes un projet pilote dans le bassin versant du lac Cyohoha qui s’étend de part et d’autre de la frontière entre les deux pays. Le projet a mis en œuvre l’ensemble des activités nécessaires pour induire un changement: sensibilisation, participation des intéressés, renforcement des capacités institutionnelles et inclusion dans les priorités nationales. Il a amélioré les conditions de vie et a réduit la vulnérabilité face au changement climatique de quelque 30 000 habitants de la région, par des mesures «sans ou quasi sans regrets»: installations de méthanisation, infrastructure d’approvisionnement en eau, programmes de reboisement, etc.

Au cours des vingt dernières années, le Partenariat a concouru à l’élaboration de 31 politiques, stratégies et plans nationaux qui allient la sécurité de l’eau et l’adaptation au climat. Ainsi, le Zimbabwe s’est doté d’une stratégie nationale de lutte contre le changement climatique, l’Afrique centrale d’un plan d’action régional pour la gestion intégrée des ressources en eau et le Cameroun d’un plan d’action stratégique pour la biodiversité. Cela a procuré à des millions de personnes une meilleure sécurité dans le domaine de l’eau.

Austria flooding/GWP
Les dégâts causés par les inondations en milieu urbain, comme ici à Steyr, en Autriche, sont évalués à 120 milliards de dollars É.-U. par an

Le plus grand risque: l’inaction

Il reste bien sûr de grandes difficultés, mais le pire serait de ne rien faire. En 2013, le Partenariat a demandé à un groupe d’économistes, sous la direction de l’Université d’Oxford, de réaliser une grande étude sur l’approvisionnement en eau et la pérennité de la croissance (Securing Water, Sustaining Growth). Le rapport, paru deux ans plus tard, démontre que l’insécurité entourant l’eau coûte chaque année quelque 500 milliards de dollars É.-U à l’économie mondiale – sans compter les impacts sur l’environnement. Si l’on inclut ces derniers, elle freine d’au moins 1 % le produit intérieur brut (PIB) à l’échelle du globe. Les dégâts infligés par les seules inondations en milieu urbain sont évalués à 120 milliards de dollars par an, tandis que les grandes sécheresses ralentiraient d’un demi-point de pourcentage la progression du PIB par habitant. Dans les pays extrêmement vulnérables, réduire de moitié les impacts de la sécheresse pourrait majorer de 20 % le PIB par habitant sur 30 ans. L’investissement dans la sécurité de l’eau diminuerait une bonne part des pertes correspondantes et favoriserait une croissance viable à long terme.

Le Partenariat et l’Organisation de coopération et de développement économiques ont repris les conclusions du rapport dans une déclaration de principes qui a été présentée à un groupe d’experts de haut niveau lors du septième Forum mondial de l’eau organisé en avril 2015 en Corée. La déclaration appelle les gouvernements à investir dans la sécurité de l’eau, la gestion des risques, la protection de la population et les partenariats, en prêtant particulièrement attention aux dangers encourus par les segments démunis et vulnérables de la société.

Soutenir l’objectif 6

SDG6Le Programme de développement durable à l’horizon 2030 entend éliminer la pauvreté en l’espace d’une génération. Il faut agir sans tarder pour atteindre un objectif aussi ambitieux. Grâce à l’expérience et aux connaissances qu’il a acquises pendant vingt années, le Partenariat aidera les pays à réaliser les objectifs de développement durable par le biais de son Programme d’aide à la préparation. Ce dernier permet de bâtir des alliances avec les partenaires d’exécution, tels ONU-Eau, l’initiative Cap-Net du PNUD, l’OMM et d’autres instances.

Le Programme de préparation a pour but d’assister concrètement 20 à 25 pays à atteindre l’objectif 6 et les autres objectifs de développement durable liés à l’eau. Les résultats suivants sont escomptés:

  • Amélioration des politiques, du financement et du suivi: œuvrer de concert afin que les cadres nationaux de planification et de définition des politiques soient orientés vers les objectifs de développement durable; aider les pays à comprendre les mécanismes de financement offerts et à en bénéficier; élaborer et mettre en place de concert de solides cadres mondiaux et nationaux de suivi des objectifs liés à l’eau;
  • Élargissement des connaissances et des capacités: aider les pays à acquérir les compétences voulues pour mettre en œuvre les objectifs de développement durable liés à l’eau et à comprendre les questions associées à la réalisation de l’objectif 6;
  • Renforcement des partenariats: inclure dans le réseau du GWP les acteurs d’autres domaines qui entretiennent des rapports étroits avec le secteur de l’eau; diffuser les initiatives dans l’ensemble des partenariats de manière à favoriser l’atteinte des objectifs de développement durable.

La récente note d’information sur le rôle stratégique du GWP esquisse un plan ambitieux pour convaincre les dirigeants que la gouvernance intégrée des ressources en eau est l’assise de la sécurité alimentaire et énergétique, du recul de la pauvreté, de la stabilité sociale – et de la paix. Le Partenariat s’engage à faciliter la mise en œuvre des objectifs et des cibles de développement durable liés à l’eau en tant que fondement de la justice sociale, de la prospérité économique et de l’intégrité de l’environnement.

Authors

Steven Downey, Global Water Partnership

Frederik Pischke, Global Water Partnership

 
 
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